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A l’approche des examens, pagaille et incertitudes à l’université Paris I - Anne-Louise Sautreuil, Le Monde, 20 mai 2009
jeudi 21 mai 2009, par
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Le mouvement contre la réforme des universités conduite par Valérie Pécresse semble avoir fait long feu. L’assemblée générale qui s’est réunie à la Sorbonne, mardi 19 mai, a voté la reprise des cours et s’est prononcée en faveur de l’organisation des examens. Catherine Germain, la directrice de cabinet du président de l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, l’assure : "Les cours vont reprendre normalement et tous les partiels seront organisés." Dans les couloirs du centre universitaire de Tolbiac, les étudiants sont partagés entre déception et incertitudes.
Dans la petite cour de l’université, peu de choses rappellent le mouvement de grève. Les murs gris et vétustes sont, certes, toujours recouverts d’affiches dénonçant la politique de Nicolas Sarkozy, mais dans ce bastion traditionnel de la contestation estudiantine, ce paysage très politique n’a rien d’inhabituel. Un peu plus loin, un panneau indique aux étudiants où se renseigner sur l’organisation de leurs partiels. Car le mois de mai et son lot d’examens venus, de nombreux élèves se trouvent dans une situation délicate. Certains n’ont pas eu cours depuis le mois de février et s’inquiètent des modalités du contrôle des connaissances. Et comme l’organisation des examens dépend de chaque UFR (unité de formation et de recherche), tous les étudiants ne sont pas logés à la même enseigne.
"C’EST LE FLOU TOTAL"
Installé en tailleur dans un recoin de la cour, Olivier Schuwer, étudiant en deuxième année d’histoire – une filière particulièrement touchée par le mouvement – n’est pas très optimiste. Il a appris "en lisant Le Monde", que l’organisation des examens avait été votée en assemblée générale. Mais pour lui, qui n’a eu que peu de cours depuis février, cette nouvelle "ne change vraiment rien" et il reste "dans le flou total", concernant la tenue de ses examens. "Je n’ai pas de date d’examen et on sera tenu au courant au dernier moment. J’ai voté la non-tenue des examens, on ne peut pas donner de partiels sur des cours qui n’ont pas eu lieu."En géographie, par exemple, affirme-t-il, en montrant du doigt un groupe de jeunes filles, ça a été beaucoup mieux organisé qu’en histoire !"
L’une d’elles, Léa Tamburini, étudiante en droit et géographie confirme. "Nous avons manqué des cours, mais tout a été fait pour que nous ne soyons pas trop pénalisés. De toute façon, les cours sont finis. Tout était déjà prévu pour nos examens. Certains professeurs nous ont dit que nous devions rendre un devoir, d’autres nous ont donné des documents à étudier." Attentive aux propos de sa voisine, Lou Poisson, qui suit le même cursus, nuance : "Le problème ne se pose effectivement pas vraiment pour cette année, mais pour l’an prochain. Par exemple, nous n’avons pas fait de cartographie cette année, on va devoir travailler deux fois plus l’an prochain pour rattraper ce retard !"
"PAS VRAIMENT CONCERNÉS"
Adossés contre les portes vitrées qui mènent aux amphitéâtres, trois étudiants en mathématiques écoutent avec une certaine distance le récit des déboires de leurs camarades. Tous leurs cours ont été assurés et leurs partiels vont se dérouler comme prévu. Ils ne se sentent "pas vraiment concernés" par les problèmes rencontrés par les autres étudiants. "La contestation est moins forte chez nous car notre filière [mathématiques appliquées et sciences sociales] a de vrais débouchés, nous sommes peut-être moins inquiets que les autres", explique l’un d’eux. "En tout cas, je suis satisfait d’avoir pu aller en cours, surenchérit son voisin. Au moins mon diplôme ne sera pas dévalorisé !" Tous deux s’accordent à dire que l’université ne devrait pas "accepter autant d’étudiants dans des cursus ayant peu de débouchés comme la philosophie".
La plupart des étudiants affirment soutenir le mouvement de contestation des enseignants-chercheurs. Mais à l’approche des examens, l’heure est à la résignation. Certains ressentent même un sentiment d’échec, comme Emmanuel Charreau, étudiant en double licence philosophie et droit. "La mobilisation n’aura pas servi à grand chose, le gouvernement n’a ni modifié les textes, ni donné de garanties. C’est un constat d’échec et maintenant qu’il faut valider l’année, beaucoup de gens se rendent à l’évidence."
"De toute façon, les professeurs sont vraiment en colère, souligne Olivier Schuwer. "Je pense que dès la rentrée, une forme de résistance interne va se mettre en place." Et tant pis pour l’image des universités, que certains disent écornée par ces grèves. Ils sont nombreux à mettre en avant, comme Chloé Terraube, 20 ans, étudiante en bi-licence de droit et de philosophie, l’importance pour la jeunesse d’avoir avant tout "une conscience politique."
Anne-Louise Sautreuil