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Verbatim de la 2e séance du séminaire "Politiques des sciences" (EHESS) : Régimes d’évaluation 1 - 18 novembre 2009.
jeudi 3 décembre 2009, par
* Michel Agier (EHESS) Présentation séminaire du 181109
Introduction générale
Le séminaire a été ouvert par un thème général, que nous avons appelé « Enjeux et futur du mouvement universitaire »[1]. Cependant le projet consiste aussi, durant l’année, à développer un certain nombre de thématiques. Plusieurs séances seront consacrées à la thématique : Recherche et société ; la programmation scientifique ; les grands institutions de recherches, etc. Chacun de ces thèmes aura deux ou trois sessions de réflexion dans l’année. Il y a aussi un thème, que nous avons appelé : Régimes d’évaluation, et auquel nous consacrerons plusieurs séances. Vous savez bien que c’est l’une des questions qui nous a beaucoup occupées pendant le mouvement, qui s’est déroulé entre janvier et mai, en particulier la discussion sur les nouvelles manières de faire dans le domaine de l’évaluation, la création de l’AERES, avec l’intervention d’instances dans lesquelles il n’y a eu aucune représentation reconnue du monde de la recherche et des instances qui n’émanaient pas des établissements de recherche mais directement du ministère.
Introduction de la séance
Donc, on va essayer d’approfondir cette thématique. Aujourd’hui avec une mise en perspective, comme on l’avait déjà un peu fait l’an dernier, sur l’évaluation dans un ensemble de secteurs dont l’Etat a la responsabilité. On l’a même appelée « l’évaluation comme principe politique » : est-ce que c’est devenu un principe de gestion généralisée d’un Etat qu’on appellerait Etat néolibéral, ou d’une volonté néoconservatrice de la part des Etats ? On sait bien que sur le plan politique, ça a été rappelé la dernière fois, il y a non seulement une économie, une politique, mais aussi une idéologie dite néolibérale. Alors, peut-être qu’il faut qu’on se débarrasse de ce terme néolibéral et qu’on essaye de voir plus précisément de quelle idéologie il s’agit. Et, p.e, de quelle culture de travail, culture d’entreprise, de quelle manière de faire il s’agit lorsqu’on désigne sous ce terme ces politiques qui concernent la recherche, qui concernent l’éducation, qui concernent l’hôpital, le domaine de la culture, et qui consistent à mettre en concurrence des individus, avec aussi une faculté à responsabiliser les individus jusqu’au point d’aboutir à des échecs comme on le voit dans ces choses qui sont malheureusement « à la mode », comme on dit. Mais France Télécom nous montre qu’une des manières d’apparition de cette souffrance au travail vient aussi de la subjectivation que le nouveau dispositif de travail impose aux individus qui se responsabilisent au prix de leurs propres échecs. Et, d’une certaine façon, chacun est pris comme responsable et co-auteur de certaines réformes dont il est aussi responsable des échecs. Il me semble que c’est aussi ce que l’on voit poindre, pour ce qui nous concerne, dans la manière aussi de concevoir l’évaluation et l’expertise : il nous faut nous mettre en concurrence les uns avec les autres, on l’a évoqué la dernière fois. Et je crois que c’est quelque chose qui est assez pénible dans le monde de la recherche, cette mise en concurrence des individus qui est autre chose que la compétition intellectuelle, puisqu’il y a un certain nombre de carottes comme les primes d’excellence scientifique, etc., qui changent l’idéologie du travail, d’une certaine façon, la culture du travail dans laquelle nous sommes nous mêmes engagés.
Peut-être que cela prend son sens dans ce qu’on appelle un « new public management », une nouvelle manière de gérer les affaires publiques, une transformation du périmètre de l’Etat, une externalisation aussi de toutes les procédures, procédures d’évaluation notamment, qui se détache de la culture des chercheurs eux-mêmes, p.e. en produisant des experts capables de nous objectiver à partir d’un certain nombre d’abstractions, de quantifications, etc., qui ne reflètent en rien la réalité de notre travail.
Voilà, ces choses un peu générales, je crois que Sylvain les redira d’une manière plus précise et systématique en conclusion de cette discussion. Donc, j’ai invité Richard Rechtman, qui est psychiatre et anthropologue au CHS La Verrière, et qui est également membre de l’IRIS, ici à l’Ecole, pour nous parler de l’hôpital psychiatrique ; Emmanuel Didier, qui est au GSPM, qui nous parlera des nouveaux modes de définition des politiques de l’évaluation dans la police ; Albert Ogien, Cnrs, au Centre d’Etude des Mouvements Sociaux, qui va nous parler de l’esprit de la LOLF. Et puis, donc Sylvain remettra ces données en perspective par rapport à ce que nous connaissons dans le domaine de la recherche.
Pour lire Richard Rechtman, (IRIS,EHESS)
Emmanuel Didier (GSPM, EHESS) sur la police
Albert Ogien (CEMS-IMM), Politiques de l’évaluation : L’évaluation comme principe politique