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Bonne année ?! - Yann Bisiou, Le sup en maintenance, 3 janvier 2015
lundi 5 janvier 2015, par
Les voeux des personnages publics sont souvent très commentés.
Pas les cartes de voeux ? Mais si, même les cartes ! Cruel (un peu) et instructif (beaucoup).
"L’honneur est ce bien moral conquis dans la lutte
et qui permet à la fois d’acquérir la considération d’autrui
et de conserver sa propre estime."
[fuchia]E. Orsenna, L’honneur n’est pas seulement le mérite[/fuchia]
Geneviève Fioraso vient de présenter ses voeux pour l’année 2015 sous la forme d’une carte sur Twitter et d’une animation Flash® sur le site du ministère.
Si Najat Vallaud Belkacem a pris soin de dédier les siens "à tous les personnels du ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, aux élèves et étudiants, aux parents d’élèves et aux collectivités", Mme Fioraso ne s’est pas donnée cette peine. Pas un mot pour les personnels ou pour les étudiants, Mme Fioraso présente ses vœux à la cantonade !
La carte de vœux elle-même est révélatrice des centres d’intérêts, ou plutôt du désintérêt manifeste de Mme Fioraso pour certaines disciplines et certains acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Pas une image d’étudiant, pas une image d’université, pas une image illustrant les Sciences Humaines et sociales. Cette carte de vœux est à l’image de la politique clientéliste de Mme Fioraso.
Ô bien entendu, il y a Rosetta, une scène chirurgicale - que l’on imagine être celle du coeur Carmat - et une voiturette qui ressemble à celles que fabriquait Heuliez, si chère à l’ancienne présidente de la région Poitou-Charentes, avant sa fermeture en 2013... Et puis il y a le nucléaire, l’agro-alimentaire, les nano-technologies, les transports... bref tous ces lobbies que Geneviève Fioraso soutient avec constance depuis bientôt trois ans et qui, il est vrai, le lui rendent bien. Des voeux à la cantonade donc, mais des voeux entre amis, entre copains.
On pourra se consoler en se disant que tout cela n’a pas du coûter bien cher. La composition est vieillotte, pas "innovante" pour deux sous, et les images ont l’air piquées un peu au hasard dans les pages "actualités" du site du ministère ou sur Internet, ici pour l’image de Rosetta, là pour le grand collisionneur du CERN . Ça fait cheap et bâclé entre la lecture de deux vidéos sur Youtube.
Et puis il y a cette phrase d’Hubert Curien. Je la trouve terriblement creuse, mais bon ! La phrase se trouve gravée sur les murs d’une salle au Ministère de la recherche et elle était sur la page de garde de la plaquette d’hommage que Geneviève Fioraso a préfacé en septembre 2012 ! Pas compliquée à retrouver donc. "Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme"...
Anecdote me direz-vous ? Pas tant que ça. C’est comme "l’affaire Piketty"et cette Légion d’honneur que Mme Fioraso propose d’autorité, sans se soucier de l’avis de l’intéressé. Ceux qui connaissent le processus conduisant à l’attribution d’une distinction honorifique savent que l’on se renseigne sur l’état d’esprit du futur bénéficiaire ! J’ai un grand respect pour ces distinctions qui constituent, de mon point de vue, une des rares façon d’exprimer la reconnaissance de la Nation, mais je comprends aussi qu’une personne ne souhaite pas être ainsi distinguée. Si l’on veut rendre hommage à quelqu’un, la moindre de chose est de s’assurer avant que cet hommage sera bien reçu comme tel par le bénéficiaire. Mais non ; Geneviève Fioraso n’en a cure et offre à Stéphane Le Foll l’occasion de dire une nouvelle fois tout le mépris qu’il a pour les chercheurs : ""qui a des idées intéressantes mais qui est chercheur, qui est dans son bureau, qui fait des calculs, qui a comme responsabilité une démarche intellectuelle et puis la politique qui est confrontée à la réalité" (résumé ici)
Après une année 2012 où Geneviève Fioraso avait exprimé son mépris pour les universités, une année 2013 où la même ministre avait fait la démonstration de son incompétence avec le vote de la LRU2, une année 2014 absolument catastrophique qui se solde par 1 milliard d’euros de crédits supprimés dans l’enseignement supérieur et la recherche, un clientélisme forcené et une incompétence jamais démentie, 2015 commence en Fanfare !
Je vous souhaite à toutes et à tous... beaucoup de courage ; il en faudra.