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Motion adoptée par l’AG des enseignants des départements de philosophie des universités Bordeaux Montaigne, Lorraine, Caen Normandie, Rouen, Nice Sophia Antipolis, Montpellier, Picardie Jules Verne - 24 janvier 2018
dimanche 4 février 2018, par
Le rapport Baccalauréat 2021 a été remis au Ministre de l’Éducation
Nationale le 24 janvier 2018 et doit servir de base à la confection d’un
projet de loi devant être présenté en Conseil des Ministres le 14
février 2018. La réforme du Lycée que porte ce rapport n’aura donc pas
été discutée plus de trois semaines avec les acteurs concernés.
Son ampleur exigerait pourtant une large consultation afin d’atteindre un
consensus. En l’état, le « Rapport Mathiot » soulève de très vives
inquiétudes et des réserves non moins importantes.
La structure extrêmement complexe des formations proposées qui distingue
des unités « générale », « d’approfondissement et de complément »
ainsi que « d’accompagnement » (elles-mêmes subdivisées en «
majeures », « mineures » et « mineures optionnelles ») ne pourra
qu’aggraver les inégalités sociales entre les élèves et conduire à
une mise en concurrence des établissements, des disciplines et des
enseignants eux-mêmes. Par ailleurs, l’extension du contrôle continu au
Baccalauréat remet en cause l’égalité de traitement des élèves
devant le diplôme et fait peser sur les collègues enseignants du lycée
le risque de toutes sortes de pressions des élèves et de leurs familles.
Au-delà de ces inquiétudes, sur lesquelles de nombreuses associations de
professeurs ont attiré l’attention du Ministre, le Département de
philosophie de l’Université Bordeaux Montaigne s’inquiète de la place
de la philosophie dans cette réforme.
Si le rapport Mathiot se veut rassurant sur le sort de la philosophie qui
devient « discipline universelle », puisque l’une des rares à être
commune à l’ensemble des élèves de terminale, et qui reste la seule à
conserver une épreuve nationale finale, aucun des couples de majeures des
« humanités » dans « l’unité d’approfondissement et de complément
» ne mentionne la philosophie. Si la philosophie doit être plus qu’une
introduction de 2h ou 3h hebdomadaires ce sera dans certains
établissements qui le souhaiteront et qui le pourront tant que les moyens
humains le permettront. La disparition de tout enseignement de la
philosophie à fort horaire (du type de celui des terminales L (8h) et ES
(4h)) fait courir le risque de tarir la source des inscriptions
d’étudiants dans les départements de philosophie, de diminuer
drastiquement le nombre de postes ouverts aux concours de l’enseignement
(CAPES et Agrégation) et menace, à terme, le maintien d’une recherche
philosophique de haut niveau en France. Au fond, c’est la nature même de
l’enseignement de la philosophie au lycée qui est remise en cause par
cette auxiliarisation.
Alors même que tout le monde s’accorde sur le trop grand cloisonnement
des disciplines techniques, scientifiques et littéraires, le rapport
Mathiot, au lieu d’ouvrir des parcours permettant de lier les disciplines
à travers les grandes catégories traditionnelles, accroît cette
séparation symbolique et pédagogique. Au-delà du renforcement du hiatus
entre sciences de la nature et formelles d’un côté et Lettres, sciences
humaines et sociales de l’autre qu’entérine le rapport Mathiot, ce
dernier conduit donc à évacuer la philosophie comme spécialité.
C’est pourquoi nous demandons que la réforme du lycée et du
baccalauréat envisagée par le rapport Mathiot soit repoussée à une date
permettant une consultation et des concertations beaucoup plus larges avec
les différents acteurs de cette réforme."