Accueil > Revue de presse > Blogs > Parcoursup, la machine à exclure - Yann Bisiou, Le Sup en maintenance, 20 (...)
Parcoursup, la machine à exclure - Yann Bisiou, Le Sup en maintenance, 20 octobre 2018
samedi 20 octobre 2018, par
Le ministère vient de publier les données relatives à Parcoursup. On peut enfin comparer et évaluer la réforme par rapport à APB. Il faut toutefois être vigilant : les deux documents (APB 2017 et Parcoursup 2018) ne présentent pas exactement les mêmes données et le commentaire relatif à Parcoursup est… optimiste. Il faut donc consulter les tableaux des données accessibles ici pour APB et là pour Parcoursup et parfois reconstituer les données sources pour Parcoursup car elles ne sont pas fournies.
Le constat est sans appel : Parcoursup s’avère pire qu’APB. C’est un processus d’exclusion sociale à grande échelle. Comme nous l’avions prédit, Parcoursup est anxiogène, il ne répond pas aux attentes des candidat.e.s et il est très stigmatisant, décourageant bien des candidat.e.s. Avant de le montrer, une remarque liminaire : à en croire ces documents, le bac a été moins sélectif. Il y avait 21.196 candidats supplémentaires cette année par rapport à l’année dernière et il y a 22.855 bacheliers supplémentaires. C’était le seul handicap supplémentaire que Parcoursup devait gérer.
Un processus anxiogène
Sur les réseaux sociaux, les partisans de Parcoursup, se félicitent du taux de candidat.e.s ayant reçu une proposition. Avec APB, 94,5% des bacheliers ont eu une proposition, ils sont 94,4% avec Parcoursup. Premier constat : Parcoursup ne fait pas mieux qu’APB, mais ses partisans inversent le raisonnement et affirment qu’il ne fait pas pire… quelle ambition !
Surtout, les fans de Parcoursup passent volontairement sous silence la lenteur et le caractère anxiogène de Parcoursup par rapport à APB. Au début du processus, moins de 60% des futurs bacheliers avaient une proposition. Imaginez ce que cela signifie, pour un jeune de 18 ans qui prépare le bac de ne pas recevoir de proposition pour la poursuite de ses études. 235.000 candidats se sont retrouvés dans cette situation le 22 mai, un chiffre considérable. La veille du bac il y avait encore 86.000 candidats sans proposition, une situation totalement inacceptable. Comment peut-on se satisfaire de laisser autant de jeunes dans l’incertitude avant l’examen ?
Un système qui ne répond pas aux attentes des candidats
Deuxième constat : Parcoursup ne répond pas aux attentes des candidats. Une des difficultés auxquelles on se heurte pour comparer APB et Parcoursup est l’absence de classement des vœux. Pourtant, et c’est une surprise, les données publiées par le ministère permettent la comparaison. C’est un des enseignements majeurs de la publication. L’information se trouve dans la dernière colonne du « graphique 2 ». Le ministère a calculé le pourcentage de candidats qui, à un moment quelconque de la procédure, ont accepté la proposition qui leur était faite un jour donné et ce pendant toute la durée du processus. Le chiffre est impressionnant. Seul.e.s 28% des candidat.e.s ont accepté une des propositions reçues le 22 mai. En clair plus de 70% des candidat.e.s n’ont pas reçu le premier jour une proposition qui leur convenait.
À titre de comparaison, toutes filières confondues, APB attribuait le premier vœu à 57,1% des candidat.e.s., un taux qui montait à 82,8% pour les candidats ayant demandé une licence en 1er vœu. Pour les filières sélectives, si le vœu 1 n’était pas toujours attribué, en revanche la majorité des candidats trouvaient une place dans la filière de leur choix 1 (61,6% pour les STS, 78,5% pour les CPGE, 53,9% pour les IUT, source : Tableau 2). En clair, ils n’avaient pas toujours le BTS dans l’établissement de leur choix, mais ils obtenaient tout de même ce BTS dans un autre établissement.
Alors certes, Parcoursup a permis de « caser » plus de candidats en 2018 qu’APB en 2017, c’est le grand argument de ses partisans, mais la très grande majorité des étudiant.e.s qui sont dans nos amphis et nos salles de cours sont là par défaut.
« Chacun doit rester à sa place, ne rêvez pas, contentez vous de votre sort », voilà le discours de cette Startup Nation portée par le gouvernement, la CPU, et certains syndicats, SGEN-CFDT et FAGE notamment. Parcoursup est une machine à décourager, une machine à renoncer, et là encore, les chiffres le démontrent (graphique1). 3,3% des bacheliers n’ont reçu aucune proposition, 17,8% des bacheliers ont quitté Parcoursup, dont 15,5% alors qu’ils avaient une proposition. À titre de comparaison, avec APB (graphique 1), 0,1% étaient sans proposition, 0,2% quittant la plateforme sans proposition.
Pour lire la fin