Accueil > Communiqués et textes des syndicats, coordinations, associations, sociétés (...) > Suspendons la loi de programmation de la recherche : notre société exige (...)
Suspendons la loi de programmation de la recherche : notre société exige beaucoup mieux ! Pétition à l’initiative de Facs et labos en lutte / RogueESR / Sauvons l’Université / Université Ouverte, 22 octobre 2020
jeudi 22 octobre 2020, par
Pour signer cette pétition, préparée conjointement avec Facs et labos en lutte, RogueESR et Université Ouverte. Elle s’adresse au public le plus large ; nous vous invitons à la faire signer autour de vous.
Deux notes accompagnent cette pétition. L’une sur le budget de la LPR qui ne prévoit aucun investissement supplémentaire. Les données budgétaires ont été représentées sous la forme de 10 graphiques que nous vous invitons à diffuser partout, y compris par voie d’affiche.
La seconde note est géographique et montre que le projet de loi sur la recherche tourne le dos à un demi-siècle d’efforts de décentralisation et de politique d’aménagement du territoire en France.
La note sur l’aménagement du territoire a donné lieu à une présentation de Claude Grasland sous forme d’un séminaire vidéo
Dans un second séminaire vidéo, Marion Maisonobe analyse la répartition géographique de la production scientifique, et montre que le l’idée d’une "masse critique" nécessitant une concentration des moyens est un mythe contredit par l’analyse scientifique.
TEXTE DE LA PÉTITION
Sans recherche, notre société n’a pas d’avenir. Non seulement la loi de programmation de la recherche (LPR) en cours d’examen au Parlement repose sur un budget insincère, mais elle accélère la précarisation des jeunes chercheurs et aggrave les inégalités territoriales, au risque de créer des déserts scientifiques. Par cette pétition, nous appelons le Sénat et le Conseil constitutionnel à suspendre le processus législatif jusqu’à la production d’un nouveau texte répondant aux attentes de notre société.
Science, démocratie et société ne peuvent être séparées. Pour débattre de la crise sanitaire ou du réchauffement climatique et parvenir à faire des choix collectifs éclairés et pertinents, pour construire l’avenir, il est indispensable de s’appuyer sur des savoirs solides, garantis par une méthode scientifique éprouvée. Une démocratie a besoin que l’Université et la recherche publiques soient autonomes, ce qui ne peut être garanti que par des financements pérennes, un statut protecteur des scientifiques et un réseau d’établissements équitablement répartis sur l’ensemble du territoire. Le projet de « loi de programmation de la recherche » (LPR) ne répond en rien à cette triple urgence démocratique.
La communauté scientifique alerte depuis longtemps sur la nécessité d’un effort de financement comparable à celui de l’Allemagne, de la Corée ou de la Chine, sur l’urgence d’un programme de recrutement dans tous les corps de métier — Biatss-ITA [1], universitaires et chercheurs — sur l’impératif de financements récurrents et de garanties des libertés académiques. C’est à quoi devrait s’atteler une loi de programmation « historique » pour la recherche.
Nous présentons, dans les notes en annexe de cette pétition, les conclusions d’un examen chiffré et contradictoire du texte de loi et de son étude d’impact : l’investissement supplémentaire annoncé s’y révèle inexistant. Une fois les prévisions d’inflation et de progression de carrière incluses dans le calcul, les sommes annoncées par la LPR ne représentent aucun investissement supplémentaire, même en admettant que l’Assemblée nationale les valide pendant trois mandatures successives. Les projections démographiques font apparaître une baisse spectaculaire de la dépense moyenne par étudiant à l’université, telle qu’elle ne pourra plus masquer des inégalités territoriales et socio-économiques toujours plus profondes. Enfin, la précarisation statutaire qui caractérise les recrutements prévus par la loi induit un risque élevé de renforcement des inégalités entre femmes et hommes dans le milieu scientifique.
L’analyse révèle en outre des manques criants dans l’étude d’impact transmise aux deux chambres concernant les effets de cette loi sur l’égalité et la cohésion des territoires d’une part, sur le couplage de la LPR à la réforme des retraites d’autre part. Sur ce dernier point, notre analyse permet de penser que les revalorisations salariales et indemnitaires annoncées reposeront en réalité sur la baisse des cotisations patronales payées par l’État pour les salaires des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Il est donc manifeste que le débat sur la LPR a été faussé par la transmission aux parlementaires de données biaisées si ce n’est fallacieuses.
Un tel processus législatif augure mal de l’avenir. Avec cette loi, le gouvernement prend le risque que l’État et la société n’aient plus désormais les moyens de s’appuyer sur des jugements scientifiquement fondés pour éclairer les débats qu’ils devront avoir et les choix qu’ils auront à faire. Pour éviter ce qui serait un désastre scientifique et démocratique, nous demandons la suspension du processus législatif de la LPR jusqu’à la publication de chiffres fiables et d’une étude d’impact sérieuse, conformes aux standards de la science comme aux exigences du travail parlementaire.
Une pétition jumelle a été déposée auprès du Sénat, demandant la création d’une mission de contrôle sénatoriale des impacts des politiques d’excellence sur la cohésion économique sociale et territoriale en se référant non seulement à la constitution française mais aussi aux traités européens. Elle est actuellement en phase de validation technique d’une durée maximale de 15 jours. Elle ne sera ouverte à la signature que si elle franchit avec succès ce passage
[1] Les acronymes BIATSS et ITA désignent respectivement les personnels des filières administratives, techniques, sociales, de santé et des bibliothèques ; et les ingénieurs, techniciens et personnels administratifs.