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Loi de programmation de la recherche : des avancées en trompe-l’œil - David Larousserie, Le Monde, 16 novembre 2020
mardi 17 novembre 2020, par
Le texte, voté mardi, a pour ambition d’empêcher le décrochage de la recherche française. Mais les moyens déployés sur dix ans pour redresser la barre se révèlent moindres que les chiffres ne le laissent penser.
Mardi 17 novembre, l’Assemblée nationale vote le projet de loi de programmation pour la recherche (LPR), après être tombée d’accord avec le Sénat le 9 novembre sur une version commune. Ce texte, très attendu par la communauté scientifique, avait été annoncé le 1er février 2019 par le premier ministre Edouard Philippe, avant d’être mis entre parenthèses durant le premier pic pandémique, puis de resurgir en juin. Son objectif principal est de redonner des moyens à la recherche après avoir établi des constats sans appel sur la situation faisant craindre un décrochage et une perte d’attractivité : manque de financement des laboratoires, érosion des emplois, faibles rémunérations…
L’unanimité des constats n’a cependant pas déclenché l’unanimité en faveur de la LPR, qui a essuyé les critiques l’hiver dernier. De nombreuses instances collectives ont émis des doutes sur l’effort budgétaire réel, ou sur plusieurs dispositions touchant au métier, depuis des motions de laboratoire jusqu’aux principaux syndicats, ou au Conseil économique social et environnemental, en passant par un collectif de sociétés savantes.
Seul le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (Cneser), l’une des instances de consultation, s’est montré favorable, dans des conditions contestées par une partie de ses membres. Et au moment où tout semblait décidé, deux amendements ont réveillé les critiques. Synthèse des principaux changements.
Un effort budgétaire à relativiser
Cette loi de programmation fixe les évolutions budgétaires sur dix ans. En 2030, la partie « recherche » du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation sera 5,8 milliards d’euros plus élevée qu’en 2020, soit 30 % de plus environ qu’aujourd’hui.
Cette augmentation peut sembler importante, mais elle a été relativisée par beaucoup de critiques. Le Sénat, en commission, a noté que compte tenu de l’inflation, ces presque 6 milliards ne seront en réalité qu’un milliard. Le collectif RogueESR, qui « rejette fermement la politique d’enseignement et de recherche menée par le gouvernement actuel » depuis 2017, a montré que la pente de progression entre 2021 et 2030 serait finalement la même que ces dernières années, moins de 500 millions d’euros par an, si l’on prend en totalité les trois programmes budgétaires concernés par cette loi (recherche spatiale, recherche pluridisciplinaire, recherche universitaire). Entre 2009 et 2020, la progression de cette enveloppe avait été d’un peu de moins de 5 milliards.
Surtout, que ce soit les syndicats, les sociétés savantes, le premier groupe de travail réuni en amont de la LPR… toutes les estimations des besoins réalisées en amont de la loi pour corriger le décrochage tombaient sur au moins 1 milliard par an, soit le double de l’effort de la LPR.
A l’Assemblée nationale, la députée socialiste du Tarn-et-Garonne Valérie Rabault a également présenté un contre-budget de cet ordre. Elle a rappelé que l’évolution prévue par le gouvernement ne permettrait pas que les dépenses publiques en faveur de la recherche atteignent 1 % du produit intérieur brut (PIB), une cible qui fait consensus dans les pays développés.
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