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Xavier Darcos et le « peuple braillard » - Patrick Rodel, "Médiapart", 12 mars 2009

vendredi 13 mars 2009, par Laurence

Xavier Darcos était, l’autre jour, à Bordeaux où l’appelaient des affaires importantes et surtout sa candidature aux prochaines élections régionales - raison, sans doute, pour laquelle il n’accompagnait pas le Président au Mexique -. Tout au long de son périple à travers la ville, il a été suivi par des manifestants qui entendaient lui faire savoir leur mécontentement des réformes qu’il a engagées. Rien que de très normal, là. Comme il n’est qu’un ministre, et plus très bien en cour, il n’avait pas autour de lui un mur suffisant de gardes du corps, de policiers, de tireurs d’élite pour empêcher que n’arrivent jusqu’à lui les cris de rage et d’hostilité de "ses" personnels - puisque c’est ainsi qu’on parle dans l’entourage de notre Président -.

Le journal Sud-Ouest rapporte que Xavier Darcos, visiblement d’assez mauvaise humeur, - il ne faisait pas aussi beau à Bordeaux qu’au Mexique et il n’avait même pas la compensation de déchaîner l’enthousiasme des foules - a marmonné ces mots dont je ne sais s’ils ont été repris par d’autres medias mais qui me paraissent tellement caractéristiques des dérives que Mauduit et Plennel dénoncent ici même -, Darcos, donc, a osé marmonner, mais de manière assez distincte pour qu’on l’entende :

"peuple braillard" et on voit d’ici le rictus méprisant, la lippe affaissée de dégoût de l’"aristocrate" forcé de côtoyer la plèbe, cette populace inepte et ignarde qui est incapable de comprendre que ce qu’on fait c’est pour elle, qui ne sait que gueuler, qui n’a rien à proposer qui vaille devant la voix toute-puissante de la raison et du réalisme conjugués. Ce peuple qui n’est pas composé d’adultes conscients mais d’enfants ou même pire d’animaux - car que veut dire "brailler" ? X. Darcos, au temps où je le connaissais, était un fin lettré - on peut donc le créditer de savoir ce que parler veut dire. "Brailler" vient d’un verbe du latin populaire, "bragare", dont dérive aussi notre "braire". Il signifie, à l’heure actuelle,"crier fort, de manière assourdissante". Ce que fait le "braillard", mais surtout le jeune enfant.

"braillard" donc le "peuple" qui revendique, ce peuple d’ânes et de mômes, ce peuple qui a l’insolence de ne pas rester silencieux, ce peuple qui a l’irrévérence de ne pas s’aplatir devant le verbe présidentiel - mais, oui, mon cher ami, c’est possible -, ce peuple qui n’a pas encore oublié la culture républicaine qui est la sienne, n’en déplaise à ceux qui nous gouvernent !

Mais qu’on le bastonne pour qu’il ferme sa gueule - quoi de plus normal, dit cette fausse mère de Mam, quand on a l’imprudence d’être là simplement sur le parvis d’une gare, après un voyage pédagogique d’initiation civique, avec visite de L’Assemblée nationale, de la Représentation nationale, et que les forces de l’ordre font leur boulot en force en tapant sur des gosses qui rentrent chez eux - comme ça ils seront totalement initiés, ces mômes et s’ils braillent, eux, c’est parce qu’ils ont mal...