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Au sujet de la liste de revues labellisées par l’AERES en Géographie, Aménagement et Urbanisme, Denis Eckert, M@ppemonde

mardi 21 septembre 2010, par Martin Rossignole

L’AERES a mis en ligne, le 13 janvier 2010, une version actualisée de la liste des revues qu’elle labellise en Géographie, Aménagement et Urbanisme. Cette liste est la troisième du genre, après les moutures de 2008 et 2009 (encadré 1). L’agence a prévu en effet que les listes de revues du domaine des Sciences humaines et sociales soient remises à jour selon un rythme annuel.

Encadré 1
- La première liste de revues de l’AERES avait été publiée en juillet 2008. Ses modalités d’établissement avaient fait l’objet de critiques [1] ; elle reste toutefois valable pour évaluer la production de la dernière vague des laboratoires (dite « vague D ») qui seront expertisés pour leur activité de la période 2010-2013.
- La deuxième version de la liste en Géographie, Aménagement et Urbanisme (2009) a représenté une rupture par rapport à l’esprit qui avait inspiré l’établissement de la première liste. La hiérarchisation selon trois niveaux A, B et C y a laissé place à une liste indifférenciée de revues labellisées, ce qui correspondait aux souhaits d’une bonne partie de la communauté scientifique.
- La version de janvier 2010 peut être appréciée comme une simple évolution par rapport au millésime 2009, avec l’ajout de douze revues, à la suite d’un travail préparatoire effectué quelques mois auparavant par une commission ad hoc dont la composition est précisée sur le site de l’Agence. Cela témoigne d’une transparence des procédures que l’on ne peut que saluer.

Quel paysage nous propose désormais l’AERES des supports de publication labellisés dans notre discipline ? Il faut évidemment prendre en compte la déclaration liminaire : « Ces listes ne constituent pas un cadre contraignant et l’appréciation de la qualité des travaux par les experts reste le critère primordial d’évaluation ». Néanmoins, ce document, d’une manière ou d’une autre, fait référence, même s’il n’a pas de caractère absolument prescriptif. Il est utile de l’examiner avec précision.

On trouve 218 revues référencées.

On peut s’étonner, malgré des demandes convergentes de la communauté scientifique dès 2008, que les revues signalées par l’AERES ne soient toujours pas identifiées par leur ISSN (International Standard Serial Number), un numéro attribué à l’échelle mondiale pour chaque périodique et permettant de l’identifier de manière certaine. L’absence de l’ISSN crée des possibilités de confusion et ne permet pas de démêler d’éventuels cas d’homonymie. Tout cela peut perturber l’utilisateur qui doit pouvoir se repérer à coup sûr dans cette liste puisqu’elle correspond à des normes d’évaluation de son activité professionnelle.

On a pourtant des exemples de « bonnes pratiques » hors de nos frontières. L’organisme sud-africain qui s’occupe d’évaluer et organiser la recherche, le Department for Higher Education (DoHEt, qui dépend du Ministère de l’Éducation), publie ainsi des listes de revues recommandées toujours accompagnées de leur ISSN. C’est aussi le cas des entités indépendantes qui indexent la production des revues scientifiques à l’échelle mondiale. Elles publient les listes des revues qu’elles référencent en les identifiant systématiquement par l’lSSN : on pense à l’IBSS (International Bibliography of the Social Sciences [2]), ou au SSCI (Social Sciences Citation Index, créé par l’Institute for Scientific Information, aujourd’hui propriété de Thomson-Reuters).

Précaution inutile dans le cas des revues signalées par l’AERES dans notre domaine, nous dira-t-on : il s’agit d’une liste relativement restreinte dont notre communauté scientifique a une bonne connaissance. Nul besoin d’indiquer l’ISSN de revues comme Mappemonde ou de ses consœurs les plus connues. On s’est pourtant attelé à l’exercice, qui ne s’est pas avéré tout à fait inutile.

1. Quel degré d’exactitude des informations ?

Donc, 218 revues labellisées dans une liste comportant 215 lignes. Pourquoi cette petite différence ?

Par commodité de présentation, l’agence a validé sur la même ligne (item 48 de la liste d’origine) quatre revues, Environment and Planning series A, B, C, D, alors qu’il s’agit de revues distinctes, qui ont des ISSN différents, des comités de rédaction indépendants et, certes, un seul éditeur. Nous aurions préféré une présentation précise, même si elle peut paraître répétitive :

* Environment and Planning A : Environment and Planning
* Environment and Planning B : Planning and Design
* Environment and Planning C : Government and Policy
* Environment and Planning D : Society and Space

Au-delà de cet éclaircissement, le reste de la liste correspond-il à des revues existantes ? On voudra bien pardonner l’impertinence de la question. Pour pouvoir répondre sur le fond, on s’est proposé d’éprouver le degré de conformité de cette liste avec une liste effective de revues vivantes, ce qui impliquait de vérifier systématiquement les ISSN que l’on pouvait y associer.

Les résultats de ce travail font apparaître des divergences avec les travaux de l’AERES, à la fois sur le nombre de revues et leur dénomination précise.

217 revues, pas 218

Si notre analyse est exacte et certaines de nos hypothèses justes, nous arrivons à 217 revues, soit une de moins que dans la liste publiée.

Comment expliquer cette différence ? En fait, il n’y pas une mais plusieurs erreurs ou approximations dont les effets s’annulent en partie. On aboutit en fin de compte à cette différence d’une unité.

Un titre, deux revues concurrentes pour le label AERES (mais elles l’ignorent)

Un premier doute concerne la revue Geography. S’agit-il de la revue britannique Geography (ISSN : 0016-7487), ou de l’américaine Journal of Geography (ISSN papier : 0022-1341, électronique : 1752-6868) ? Il s’agit de deux revues qui ont été créées au départ par des associations d’enseignants, la Geographical Association pour la revue britannique, le National Council for Geographic Education pour sa consœur d’outre-Atlantique. La revue états-unienne, éditée par Routledge, a une présentation en ligne plus « scientifique » : son site présente la politique éditoriale, le comité de rédaction, alors que Geography a une présentation beaucoup moins fouillée et d’ailleurs une notoriété faible sur le Web (il est très difficile de la trouver en ne tapant que son nom dans l’un ou l’autre des moteurs usuels).

Voilà précisément un cas où l’ISSN est une précision indispensable. Il faut, en effet, identifier correctement ce support afin de pouvoir éventuellement orienter vers la bonne revue les projets de publications de collègues qui se sentiraient proches de son orientation éditoriale.

Faute d’éléments d’appréciation, nous n’avons pas tranché. Les deux revues sont présentées avec les numéros 82a et 82b dans notre tableau. Ceci n’influe pas donc sur le nombre de revues que nous supposons labellisées par l’AERES.

Une revue qui disparaît sans postérité

Un cas peut être considéré comme plus gênant : Géographie Physique et Quaternaire (ISSN : 0705-7199 ; e-ISSN : 1492-143X) a cessé de paraître en 2007. Certes, ses contenus restent pour l’instant accessibles en ligne, mais il est néanmoins impossible de considérer qu’on puisse, en 2010 et au-delà, recommander d’y publier.

Une revue qui change de nom mais reste en doublon sur la liste

On a trouvé deux entrées : la Revue de Géomatique (ISSN : 1166-9624), item 181 et la Revue internationale de Géomatique (ISSN : 1260-5875), item 185, qui en fait ne correspondent qu’à une seule revue.

La Revue de Géomatique a cessé de paraître en 1993 (17 ans avant l’établissement de la liste AERES actualisée), ayant été remplacée à partir de 1994 par la Revue Internationale de Géomatique, qui est dûment référencée elle aussi. Ainsi au lieu de deux revues signalées, il n’existe qu’une revue vivante.

Des revues regroupées sous le même nom

L’AERES labellise Geografiska Annaler (item 72). Mais on ne peut savoir s’il s’agit de la série A ou de la série B, qui sont des revues nettement différenciées, dont les orientations rédactionnelles sont tout à fait indépendantes. Nous avons donc décidé, pour cette entrée unique, de faire apparaître les deux revues : Geografiska Annaler : Series A, Physical Geography (ISSN : 0435-3676), ainsi que Geografiska Annaler Series B : Human Geography (ISSN : 0435-3684).

Quelques erreurs de dénomination

Les revues ayant changé de nom au cours de leur histoire et dont l’AERES a conservé la dénomination antérieure

Global Ecology and Biogeography Letters (ISSN : 0960-7447) a cessé de paraître en 1998. Aujourd’hui, la suite a été prise par Global Ecology and Biogeography (ISSN : 1466-822X).

Planning Theory Newsletter (item 166 de l’AERES) a cessé de paraître en 2001. Aujourd’hui, la suite a été prise par Planning Theory (ISSN : 1622-468X ; e-ISSN : 1963-1022) .

Une revue dont le nom n’est pas correct

C’est le cas de la Revue d’Histoire des Sciences de l’Homme (item 183) : cette publication s’est toujours appelée, depuis sa fondation en 1999, Revue d’Histoire des Sciences Humaines (ISSN : 1622-468X, e-ISSN : 1963-1022).

Au total, on voit que la liste proposée comporte certaines approximations, finalement assez faciles à corriger si l’AERES, dans un proche avenir, prend la peine d’introduire les ISSN des revues qu’elle référence, et tranche dans les cas douteux que nous avons relevés.

Pour lire la suite sur le site de la revue M@ppemonde

Pour suivre de manière générale et instructive l’actualité en matière d’évaluation de la recherche, voir le site Evaluation de la Recherche en SHS qui nous a d’ailleurs indiqué l’existence de cet article.