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La présidence de l’université d’Artois s’allie à l’Institut catholique de Lille. Conférence de presse du SNESUP de l’université d’Artois le 21 février 2011

mardi 22 février 2011, par Laurence

Constatant que la Présidence de l’Université d’Artois empêche au niveau
académique une formation publique des futurs enseignants en préférant
s’allier à l’Institut catholique de Lille, les étudiants et les enseignants des sites IUFM sont entrés en
lutte, ont décidé d’alerter les élus locaux et la FSU académique avec la
section Snesup locale ont décidé d’alerter la presse.

Une conférence de presse a eu lieu le 21 février à 14 h Hôtel Astoria, Le Carnot, Place de la Gare, Arras
en présence de

- Jérôme Buresi, secrétaire de la section Snesup-FSU de l’Université d’Artois

- Jacques Stambouli, secrétaire-adjoint

- Christian Mathieu, membre du Conseil d’Administration de l’Université d’Artois

- Patrice Nagel, membre du Conseil d’Ecole de l’IUFM, membre du Conseil d’Administration
sortant de l’Université d’Artois

- Elisabeth Nonnon, membre du Conseil d’Ecole de l’IUFM, du Conseil des Etudes et de la Vie
Etudiante de l’Université d’Artois,

- Philippe Enclos, secrétaire national du Snesup, coordinateur Nord-pas-de Calais

- Catherine Piecuch, secrétaire académique de la FSU

Le texte ci-dessous a alors été remis à la presse locale (Voix du Nord, Avenir
de l’Artois
, Observateur de l’Arrageois, Liberté 62).


La section Snesup de l’Université d’Artois, qui s’est reconstituée suite au mouvement des
universités de l’année 2009, en particulier contre la réforme de formation des enseignants,
tient aujourd’hui à informer la presse des points suivants :

1. La volonté de la Présidence de l’Université d’Artois de
regrouper à Arras les sites IUFM (Instituts Universitaires de
Formation des Maîtres) de Douai, Outreau et Gravelines.

Comme nous le savons par nos collègues concernés, les étudiants des IUFM d’Outreau et de
Gravelines sont mécontents et mènent diverses actions actuellement, en particulier la grève
des enseignements depuis le 4 février à Outreau. Ces mécontentements ont bien sûr de
multiples sources : à la fois nationales, du fait du caractère désastreux des conditions actuelles
de formation des futurs enseignants du primaire et du secondaire ; mais aussi locales, du fait
de la menace de fermeture qui pèse sur ces sites. Qu’est-ce qui justifie ces craintes ?
On se rappelle l’annonce (doit-on dire prématurée ?) de la fermeture du site de Douai par M.
Christian Morzewski, Président de l’Université d’Artois, en octobre 2009, qui devait d’ailleurs
être suivie déjà par celle de Gravelines.
Aujourd’hui nous sommes dans la même situation de menaces de fermeture de ces sites même
si la situation est en apparence très différente, puisqu’aucune annonce n’est faite. En effet, par
le biais d’un "schéma pluriannuel de stratégie immobilière" que prépare actuellement la
direction de l’université dans le cadre de la politique immobilière de l’État, il a été demandé un
avis du Conseil d’Administration de notre Université d’Artois sur plusieurs scénarios
possibles, dont certains prévoient des fermetures de ces centres IUFM : Douai explicitement
et dans certains scénarios, Gravelines et/ou Outreau, indirectement par le biais de
regroupements.

Le Snesup de l’Université d’Artois dénonce fermement ces projets de fermeture de centre de formation des enseignants, qui jouent, comme notre Université, un rôle de
formation de proximité et qui permettent une démocratisation de l’accès à la formation
d’enseignants. Il rappelle que notre société a besoin d’un enseignement démocratique et
de qualité, avec des enseignants bien formés, pour répondre aux demandes de la
population et aux besoins d’une économie dynamique, créatrice d’emplois et de
richesses pour tous.

2. La volonté de donner le droit de délivrer des diplômes
universitaires publics à des organismes privés, en particulier à
l’Institut Catholique de Lille.

Dans ce contexte très tendu fait d’incertitudes face au devenir de certains sites dédiés à la
formation des enseignants, est passé au Conseil d’Administration de l’Université d’Artois un
avenant à une convention pour permettre à l’Institut Catholique de Lille (ICL) de délivrer des
masters métiers de l’enseignement.
De façon générale, cela soulève un problème de laïcité dans notre pays, c’est-à-dire de
l’application de la séparation entre l’Etat et les religions. Car l’adoption d’une convention de
l’Université d’Artois avec l’Institut Catholique de Lille pour la formation des enseignants (qui
pourront donc passer, grâce à leurs diplômes universitaires, des concours de la fonction
publique d’Etat) est une « faveur » pour un établissement privé qui dépend de l’Eglise
catholique. Rappelons que, comme nous en informe le site Internet de cet institut, son Conseil
Supérieur comprend l’archevêque de Lille, l’archevêque de Cambrai et l’évêque d’Arras.
Alors qu’on ne se prive pas de rappeler aux musulmans à juste titre d’ailleurs, la laïcité
obligatoire dans l’Education Nationale (par exemple en matière de « signes ostensibles »), on
entérine des accords Kouchner-Vatican qui reconnaissent la valeur des diplômes ayant reçu
l’approbation du Vatican et on prolonge maintenant cet accord jusque dans la délivrance de
diplômes conduisant au professorat de l’Education Nationale. Nous ne pouvons pas ainsi
cautionner cet usage scandaleusement détourné du principe de laïcité.
Cependant, nous voulons nous attarder sur la situation régionale. Les instituts catholiques,
instituts privés confessionnels, non soumis aux règles de la Fonction publique d’Etat, n’ont
pas le droit de délivrer des diplômes d’Etat. Ils le font pourtant parfois dans la pratique, via
des conventions avec des universités ou des jurys rectoraux. Pour cela, le rectorat,
représentant du Ministère de l’Education nationale, nomme des jurys, avec présence de
fonctionnaires d’Etat, en vue de délivrer les diplômes nationaux aux étudiants.
Or la pratique régionale montre que les relations ne sont pas bonnes entre les Universités
publiques et l’ICL. Par exemple, l’Université de Lille 2 a refusé de renouveler cette année sa
convention avec cet organisme, estimant être instrumentalisée . Pour pouvoir continuer à
délivrer des diplômes nationaux de Licence et Master, l’Institut catholique de Lille a donc
passé une convention avec l’Université de Toulouse1 pour les diplômes de droit. De plus pour
adosser ses maquettes master à la recherche, l’Institut catholique de Lille cherche des
cautions scientifiques et les trouve dans des conditions problématiques, elle n’hésite pas à y
mentionner que des enseignants-chercheurs d’universités publiques assurent des
responsabilités pédagogiques, parfois même, semble-t-il, à leur insu.
Le vote de la convention de l’Université d’Artois avec l’Institut catholique de Lille s’est fait
dans des conditions très douteuses. Il y a d’abord eu une convention (dont nous n’avons aucune trace et sur laquelle le Conseil d’Administration ne s’est pas prononcé) signé le 5 novembre 2010, puis le Président a soumis un avenant à cette convention au CA du 21
janvier. Cet avenant était passé peu de temps auparavant devant le Conseil des Etudes et de la
vie Universitaire (CEVU) qui l’a rejeté par 11 voix contre 8. Au conseil d’Administration du
21 janvier le résultat du vote a été le suivant :10 voix pour, 10 voix contre (et une abstention).
Ce que le Président de l’Université, Christian Morzewski, a traduit par « adopté », grâce à sa
voix prépondérante. Et cela alors même que les maquettes des huit masters concernés par cet
avenant n’avaient pas été présentées au CA.

Le Snesup de l’Université d’Artois dénonce les conditions dans lesquelles cette
convention a été adoptée entre notre Université et l’Institut privée catholique de Lille.
Elle demande que cette convention ne s’applique pas et se réserve le droit de tout
recours en justice pour obtenir l’annulation de cette convention qui transfère le service
public d’enseignement supérieur à une école privée confessionnelle.

3. La situation déplorable de la formation des enseignants de
l’académie de Lille et la remise en cause d’une formation
académique publique des enseignants.

Toutes ces observations ne doivent pas nous faire oublier la situation déplorable concernant la
formation des enseignants dans notre Académie. En plus de tous les problèmes recensés un
peu partout en France où des « nouveaux enseignants » (pour certains pas encore diplômés)
doivent faire face à des horaires et des niveaux de cours insupportables (et que certains ne
supportent pas), c’est toute l’architecture de la formation qui est en cause dans notre région.
Le 12 janvier 2010 les Présidents des différentes universités, la direction de l’IUFM et le
recteur avaient signé, bon gré mal gré, à la suite d’interventions du SNESUP un accord
intitulé « Principes directeurs pour un schéma régional de la formation des enseignants ». Il
est dit dans ce texte que « le master donnant accès au recrutement des Professeurs des Ecoles
(PE) fera l’objet d’une mention unique cohabilitée par les 5 autres universités intéressées et
portée par l’Université d’Artois et l’IUFM du Nord-Pas-de-Calais
 » et ceci « dans le respect
des exigences d’un master
 ».
La convention de l’Université d’Artois avec l’ICL risque de faire voler en éclats cette
convention obtenue difficilement puisque aucune université (pas même celle d’Artois sans
doute) n’a été associée, ni consultée pour l’élaboration des maquettes de cet établissement,
contrairement aux maquettes du master public des spécialités enseignement qui avaient été
pilotées par une commission du PRES regroupant les différentes universités. A cela s’ajoute
les conditions d’études dans les masters pour l’année prochaine. En date du 19 janvier 2011,
(c’est-à-dire après la « négociation » avec l’Institut Catholique de Lille), le Président de
l’Université d’Artois a envoyé une lettre aux présidents des cinq autres universités de
l’académie dans laquelle il écrit qu’ « en 2010-2011, l’Université d’Artois a assuré les
enseignements professionnels des masters métiers de l’enseignement du second degré (mais
pour) l’année 2011-2012 chaque université sera amenée à prendre intégralement le
financement de ces masters. Cela bouleverse évidemment les conditions de coopération
édictées par l’accord du 12 janvier. Cette lettre se conclut par la mention d’une possibilité de
« collaboration » dans une « convention 2011-2012 à conclure entre (les) établissements
. »
Le président de l’Université de Lille3 a alors dénoncé, à juste titre, la rupture unilatérale par celui de l’université d’Artois de l’accord du 12 janvier 2010, soulignant que cette question
aurait dû être « traitée » lors d’une réunion des différents Présidents le 7 février 2011 dans le
cadre du bureau du PRES. Que s’est-il dit dans cette réunion, l’opacité malheureusement est la
règle de ce bureau du PRES. Cela dit, cet échange de lettres montre à quel point la formation
des enseignants est malmenée, voire méprisée, puisque dans ces échanges il n’est en aucune
façon question de formation « réelle » à améliorer ou à créer mais seulement de question
financière voire de « réputation ». Un autre exemple vient conforter cette vision à court terme
et désastreuse de la Présidence de notre Université d’Artois : il a été suggéré et presque décidé
que l’Université d’Artois ne financerait plus (en clair fermerait) les formations dédiées à la
préparation aux concours d’enseignants des lycées professionnels si les effectifs étaient trop
faibles. Alors même que la région a un nombre important de lycées professionnels et que le
centre de l’IUFM a été lui-même centre d’examen du concours CAPLP et possède pour cela
du matériel sophistiqué.

Le Snesup de l’Université d’Artois demande dans l’immédiat que la formation des
enseignants de notre Académie continue de se faire comme prévu en janvier 2010 par
des coopérations et des cohabilitations entre les 6 universités publiques de notre
Académie.
Déjà le 23 février 2010, l’assemblée des adhérents du snesup de l’académie faisait savoir
qu’« elle réaffirmait que l’approbation, par l’ensemble des personnels concernés, de tout
schéma directeur d’organisation académique de la formation des enseignants constituait
l’une des conditions nécessaires de son succès.
Elle rappelait également cette évidence, déjà formulée dans une lettre ouverte de la FSU
Nord Pas de Calais en date du 27 octobre 2009, que cette réflexion et ces travaux
devaient aussi associer les collectivités locales concernées.
A cet effet, elle réitérait avec force la proposition d’ouverture d’une conférence
régionale à laquelle seraient invités tous les acteurs cités.
 »
Nous n’avons pas avancé depuis lors. La formation des enseignants concerne pourtant
l’avenir de notre région et de toute sa jeunesse.