Accueil > Le mouvement de 2009 > Motions et actions CNRS / organismes / laboratoires > Motion de l’URA 2096

Motion de l’URA 2096

mardi 17 juin 2008, par Laurence

La motion suivante a été soumise aux membres de l’URA 2096 par un vote à bulletin secret. Le taux de participation a été de 50%. La motion a été adoptée à l’unanimité moins une voix contre.

"La recherche française est l’objet d’une tentative de réforme dont l’un des buts est le découpage du CNRS, organisme pluridisciplinaire mondialement reconnu, en instituts thématiques séparés et placés sous la tutelle du gouvernement. Cette démarche est accomplie dans la précipitation, sans concertation réelle avec les acteurs de la recherche et leurs représentants. Les personnels de la recherche ne sont pas hostiles à des modifications du système et ont fait eux-mêmes un ensemble de propositions à la suite des Etats généraux de la recherche de 2004. Mais il ne leur semble pas que les bouleversements annoncés permettent d’améliorer la recherche. Ainsi le découpage du CNRS en instituts tel qu’il est présenté nous pose problème pour plusieurs raisons : L’efficacité de la réforme ne saute pas aux yeux. Alors que l’argument principal avancé par la ministre est le "décloisonnement", ce nouveau système d’Instituts, dans lesquels il n’est d’ailleurs pas prévu d’accueillir toutes les disciplines, ne facilitera pas la réalisation de programmes de recherche impliquant des compétences issues de différents champs scientifiques. Aucune précision n’est donnée sur le mode de financement des futurs instituts, en particulier sur le maintien d’un soutien de base décent des laboratoires, et il est fort probable, voire explicitement annoncé, que leur mise en place s’accompagnera d’un pilotage des recherches encore plus dirigiste qu’aujourd’hui. Les directeurs de ces futurs instituts, nommés directement par le pouvoir politique, au rythme de ce pouvoir-là, ne seront pas à même d’assurer la cohérence de la démarche scientifique sur le long terme. Un tel pilotage de la recherche fondamentale n’existe dans aucun des pays qui nous sont régulièrement donnés en exemple. Le projet déjà partiellement réalisé de priver le comité national du CNRS de l’essentiel de son rôle d’évaluation ne fera que renforcer cette tendance. Enfin, rien n’est dit sur le statut des personnels qui seront éventuellement recrutés dans ces nouvelles structures ; la seule chose claire est que le gouvernement pense qu’organiser la précarité des personnels, des jeunes en particulier, est la meilleure façon de leur faire « produire » le maximum.

Le cas de la biologie nous semble particulièrement préoccupant, avec le projet de ne lui accorder qu’une place mineure au sein du CNRS, l’INSERM assurant la responsabilité principale de son pilotage au travers des lancements d’appels d’offre. Ceci entraînera la disparition de pans entiers de la recherche fondamentale en biologie non médicale.

Nous pensons donc que cette réforme, qui est avant-tout de nature idéologique, n’aura aucun effet positif et qu’il ne s’agit que d’une première étape vers : 1) la suppression des emplois scientifiques permanents, qui sera plus facile à mettre en œuvre dans des instituts individualisés ; 2) la disparition des crédits de base, seuls garants d’une recherche sur le long terme. Cela aggravera la désaffection des jeunes pour ses métiers, consécutive aux politiques engagées depuis plusieurs années, et aboutira à un déclin irréversible de la recherche fondamentale française.

Nous nous opposons donc au découpage du CNRS tel qu’il est actuellement envisagé. Nous demandons : 1) que la biologie reste une composante essentielle du CNRS, organisme pluridisciplinaire ; 2) le maintien d’un soutien de base raisonnable ; 3) une vraie programmation pluriannuelle des recrutements de jeunes, dans laquelle les postes permanents ne disparaissent pas au profit de CDD ; 4) de vraies discussions prenant en compte les propositions maintes fois formulées pour améliorer le dispositif de recherche."