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PRES Sorbonne Paris Cité – "Université unifiée" : Faisons-nous entendre pour être enfin écoutés, Le Collectif pour une université confédérale garantissant collégialité et libertés académiques (université Paris-Diderot), 9 octobre 2012.

mercredi 10 octobre 2012, par Jara Cimrman

Le processus de signature de l’Idex du PRES Sorbonne Paris Cité continue de provoquer la mobilisation des collègues de l’université Paris-Diderot et a suscité la publication d’une pétition qui est reproduite ci-après.

Au printemps dernier, la liste conduite par M. Berger remportait avec une large majorité les élections universitaires et, à la faveur des dispositions injustes de la LRU, la quasi totalité des sièges des CA, CS, CEVU. Six mois plus tard, les trois conseils élus demandaient à être réunis en assemblée pour débattre de l’IDEX et voyaient rejeter par à peine trois voix d’écart une motion demandant simplement le report de la signature de la convention IDEX jusqu’aux conclusions des Assises Nationales de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche. Ainsi, en quelques mois, l’immense capital de confiance dont bénéficiait la présidence a fondu. Les interrogations gagnent même les rangs de l’équipe présidentielle, de nombreux élus relayant par fidélité à leur mandat la contestation des personnels qui, via les pétitions de sept UFR, ont exprimé leur désaccord avec la politique et les pratiques de la direction de l’université.

Car entre temps, chacun a pu observer et s’inquiéter des dérives de ce second mandat de l’exécutif. Comment continuer à croire à la vitalité de la collégialité à Paris Diderot dès lors qu’elle n’est que de façade et que le bureau de PRES indique désormais l’horizon et dicte le tempo ? Chacun a d’ailleurs pu constater les aises pris par le bureau du PRES avec la démocratie ; ses membres ne se soucient plus guère des conseils élus dans leurs établissements, les considérant au mieux comme des chambres d’enregistrement, au pire comme des freins contrariants. Les récentes manipulations de l’offre de formation en Master sans passer devant les CEVU constituent l’exemple le plus récent de cette dérive. Chacun a aussi fini par comprendre que derrière la parole présidentielle politiquement correcte se cache la banalisation sereine et sans état d’âme du mensonge par omission ou par approximation. Ainsi le président Berger peut déclarer dans la presse en mai 2012 que "la fusion des quatre universités est acquise" tout en nous assurant avec le même aplomb que le projet d’"université unifiée" est "ouvert" et que "nous pourrons en faire ce que nous voulons". De même, lorsque la présidence est contrainte de publier le projet IDEX et ses annexes, elle en censure les passages les plus dérangeants. On préférerait encore que la présidence publie en toute transparence sur le site de l’université les lettres de démission des collègues qui, cette année, ont cru bon de marquer leur désaccord avec la nature réelle des restructurations et leurs enjeux. Le comble du cynisme est atteint lorsque la présidence en appelle à une nouvelle loi cadre "adaptée aux valeurs fondamentales de l’université : démocratie, collégialité et subsidiarité", quand elle foule maintenant quotidiennement au pied ces principes, qui sont affaires de pratique et non de loi. Malgré les signes forts de désaveu, la présidence de l’université se "bunkerise" et manœuvre habilement pour imposer son projet, sans prêter attention à la contestation qui enfle, et sourde aux réactions de la communauté qu’elle est censée représenter. Pire, elle tente d’étouffer tout échange de vues en organisant à sa main une pseudo-concertation dont les conditions matérielles et le calendrier révèlent la nature, et met tout en œuvre pour interdire un réel débat contradictoire sur le devenir de Paris Diderot. Gagner la bataille de l’IDEX et de la fusion est devenu pour elle une fin en soi.

Et de nous expliquer que prendre notre temps aujourd’hui pour réfléchir ensemble à l’avenir de notre université n’est pas raisonnable, qu’il est trop tard pour changer la finalité et le contenu du projet IDEX, que les personnels ne s’y intéressent d’ailleurs pas – la preuve en étant leur faible participation aux réunions « de concertation » –, que ne pas signer dès maintenant l’IDEX nous priverait définitivement d’une manne indispensable, et pire, ne permettrait pas à l’université d’équilibrer ses comptes, que Bercy serait ravi de nous priver de ces ressources et d’autres menaces encore dont notre président aurait eu l’écho dans les allées du pouvoir sans qu’aucune de ces assertions soit vérifiable. Oubliant toutefois de dire que l’IDEX est amendable puisque, par exemple, les universités de Toulouse, autre lauréat, ont tout remis à plat en quelques mois ; que c’est l’inutilité d’un simulacre de consultation qui fait le faible enthousiasme qu’elle rencontre ; que l’Etat, via l’ANR, ne s’engage dans l’IDEX que "dans la limite des fonds dont elle dispose" ; que, quoi qu’il arrive, les huit lauréats des IDEX devront sans doute se contenter de moins que prévu pour qu’aucune université ne soit en faillite ; que notre université devra contribuer sur ses fonds propres au budget de l’IDEX pour un montant identique à celui de la dotation reçue, paupérisant d’autant ceux qui ne sont pas dans le fameux Péridex (19 millions d’euros sur 4 ans pour Paris Diderot) ; qu’il serait absurde de s’engager aujourd’hui alors que les Assises de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche ne rendront leurs conclusions qu’au printemps, d’autant que les premières auditions semblent mettre plus en avant des "établissements-têtes de réseau" que des pôles d’excellence confisquant les moyens.

La direction de l’université a choisi la stratégie de la peur et revendique la dictature du pragmatisme pour servir une politique voulue sans concertation par elle seule, mais que nous sommes de plus en plus nombreux à contester. Nous voulons que la direction de l’université s’ouvre enfin et accepte un vrai débat. Car les arguments qu’elle avance doivent être discutés point par point. En effet, d’autres projets peuvent être proposés, si toutefois les conditions matérielles de leur élaboration sont remplies. Ne le cachons pas, notre préférence va à un projet confédéral redonnant toute leur place aux UFR et aux conseils chargés des questions de recherche et d’enseignement, sans péridex, sans board, sans aucune de ces structures bureaucratiques en pelures d’oignon qui caractérisent les réformes récentes et le projet d’Idex SPC.

Du point de vue de la démocratie des débats, les universités de Toulouse sont exemplaires. On leur a promis 1,2 milliard d’euros et une avance de 13,9 M€ pour un projet d’IDEX qui était porté par un bureau de PRES, mais fortement contesté par les universitaires locaux. Eux aussi ont entendu la même musique que nous, le président de leur PRES leur expliquant qu’« il a été expressément dit par le Commissariat aux Grands Investissements que les dossiers validés par le jury ne sauraient être renégociés, sauf à désavouer le jury, ce qui est inconcevable. Dès lors, si le ministère est prêt à signer, pourquoi attendre et prendre le risque que rien ne soit jamais signé ? ». Pourtant ce projet a été suspendu avec l’arrivée de nouveaux présidents d’universités qui ont eu la volonté politique de "refuser toute signature précipitée". Malgré la menace d’une lettre du ministère de l’époque, une véritable concertation a été lancée afin de proposer une nouvelle version de l’IDEX. Elle a abouti six mois plus tard à de profondes transformations du projet. Exemples notables : l’Université de Toulouse sera fédérale, avec un gouvernement élu au suffrage direct et des CA indépendants pour chaque université ; le péridex est également supprimé, toutes les équipes et tous les laboratoires pouvant être candidats aux financements de l’Idex. Les universitaires toulousains seraient-ils donc beaucoup plus bêtes, plus irresponsables, plus naïfs ou moins soucieux de la qualité de leurs formations et de leurs recherches que nous ? La présidence aura beau jeu de dire que la situation est différente, les faits sont têtus : ce qui a été fait à Toulouse est réalisable à Paris Diderot, encore faut-il une véritable volonté politique pour aboutir.

Aussi pourquoi devrions-nous accepter sans regimber que nous soit imposé un schéma, quel qu’il soit, sans une réflexion commune et approfondie ? Si les bons élèves servis dans la première vague de l’IDEX, Strasbourg, Bordeaux, Marseille, ont choisi de fusionner, d’autres modèles sont tout aussi réalistes, Lyon, Toulouse pour ne citer qu’eux, ayant retenu le modèle fédéral. Pourquoi la direction de l’université n’accepte-t-elle pas que soient discutés les avantages et les inconvénients respectifs de chaque modèle (fusion, fédération ou confédération) ? Elle a choisi seule la fusion et ne veut rien entendre d’autre. Pourtant il y va de la réussite de nos étudiants, des formations que nous pouvons leur proposer, de l’emploi et des statuts de BIATOSS, des conditions de travail et des promotions des maîtres de conférences, de la qualité et de la pérennité de nos réseaux de recherche réels en Île-de-France.

Les directeurs de sept UFR rappelaient qu’"avant un engagement de cette ampleur, il faut que la communauté universitaire se saisisse réellement de ces questions". Des membres de la liste majoritaire s’interrogent et nous ne sommes plus dupes du discours émollient de la présidence. Le projet IDEX peut être remanié en profondeur. Aussi mobilisons-nous et soyons de plus en plus nombreux à nous faire entendre pour exiger :

- l’organisation d’une réelle concertation permettant la réécriture commune d’un projet engageant l’avenir de notre université ;

- un report de la signature de la convention de l’IDEX jusqu’à ce que ce projet conforme aux choix de la communauté universitaire, aux besoins de la recherche et à l’intérêt de nos étudiants ait été dûment validé par une consultation démocratique au suffrage universel direct. Il est, encore, une autre nécessité à ce report : pour faire un choix fondé, nous devons avoir une vision claire du nouveau paysage institutionnel (structures, implications territoriales, refonte de la loi LRU et de la gouvernance des PRES et des universités...) qui émergera des Assises nationales de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.

Ce projet collectif respectera alors les ambitions de ceux qui font véritablement vivre l’université. Il n’en sera que plus légitime.

Le Collectif pour une université confédérale garantissant collégialité et libertés académiques