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Communiqué de l’UFR de philosophie de l’université de Rennes - Academia, 28 novembre 2015

lundi 30 novembre 2015, par Victoria Serge

L’UFR de philosophie de l’université de Rennes a demandé à l’équipe qui anime le carnet "Academia" de publier ce communiqué.
On ne nous a rien demandé du tout mais on le publie nous aussi quand même, et volontiers encore. Avec la même interrogation que la rédactrice d’Académia (voir à la fin du billet).

C’est vrai, quoi : si même les Zexcellents avec plein d’IUF, ceux qui ont "joué les bons élèves de la COMUE" (ils le disent eux-mêmes), se retrouvent tellement à poil qu’ils se résolvent à faire grève... euh, là je ne sais plus : cela veut-il dire qu’on a touché le fond ou qu’il y a quelque raison d’espérer ?

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La présidence de l’Université de Rennes 1 a refusé d’ouvrir, au nom de la politique d’austérité budgétaire, les deux postes de maître de conférences que nous devions proposer cette année au recrutement. Il ne s’agit nullement de création de postes, mais du remplacement de collègues partis en retraite. Ils avaient été profilés l’un en Philosophie des sciences humaines/philosophie politique, l’autre en Philosophie allemande contemporaine. Depuis 5 ans, notre UFR a perdu 30 % de ses enseignants-chercheurs, pour un effectif qui se trouve désormais réduit à 8, alors même que nos effectifs étudiants sont stables, et que nous avons ouvert, dans le même temps, une nouvelle formation MEEF (pour la préparation des concours du recrutement du second degré) et un master tripartite Rennes/Sherbrooke (Canada)/Curitiba (Brésil). Cette décision menace non seulement tous les projets pédagogiquement ambitieux que nous nourrissions (comme la création d’une licence philo-socio avec nos collègues sociologues de Rennes 2, projet bien avancé), mais aussi notre effort pour proposer un enseignement philosophique aux étudiants des autres disciplines. Elle menace surtout le fonctionnement même de notre UFR : notre maquette a été conçue pour un effectif de 11 enseignants-chercheurs. Des domaines entiers de la recherche philosophique ne sont plus représentés dans notre offre de cours. Cette situation nous oblige à recourir de plus en plus à des vacataires extérieurs, des enseignants du secondaire certes excellents, mais dans une proportion qui menace directement la cohérence même de l’équipe pédagogique. Notre équipe de recherche, très dynamique, bien notée, comportant durant la même période pas moins de trois membres de l’IUF, a pourtant joué les bons élèves de la COMUE naissante, en faisant le choix ambitieux d’une fusion avec l’équipe du CAPHI de l’Université de Nantes pour constituer un grand pôle de recherche attractif dans le grand Ouest et gagner en visibilité internationale. Loin d’en être récompensée, elle se trouve, elle aussi, directement affaiblie par les décisions successives de notre présidence. Les tâches administratives, toujours plus nombreuses (je ne parle même pas des “stages de management” qu’ils veulent nous imposer) se concentrent sur un nombre toujours plus réduit de personnes et nous asphyxient lentement.

Cette situation est inacceptable :
1°) pour nos étudiants, qui ont droit à une formation philosophique complète et de qualité
2°) pour nous-mêmes, enseignants-chercheurs de l’UFR, qui n’avons pas les moyens de nos ambitions en termes de recherche et en termes pédagogiques
3°) pour tous nos jeunes collègues docteurs, en quête d’un poste à l’Université, aux dossiers particulièrement brillants et qui voient peu à peu toutes les possibilités se fermer, du fait de cette politique de non-renouvellement des postes de ceux qui partent en retraite.

Notre colère s’adresse à deux niveaux :
1°) au niveau de la politique spécifique de la présidence de l’Université qui, dans ce contexte de pénurie budgétaire, a systématiquement fait le choix d’arbitrer au détriment de la philosophie, dans la répartition des efforts. Aucun autre département n’a été ainsi soumis à une réduction de 30 % de ses effectifs, ce qui a désormais pour effet de menacer directement l’existence même d’une offre de formation et de recherche de qualité à l’échelle de la région Bretagne. Tout aussi insupportable est le mépris affiché par la présidence qui n’a, à ce jour, répondu à aucune des lettres de protestation que nous lui avons envoyées.
2°) au niveau de la politique universitaire nationale : la LRU, imposée par Sarkozy et qu’on nous vante comme un grand succès, a eu pour principal effet de limiter drastiquement le nombre de postes d’enseignants à l’université, alors même que le nombre d’étudiants connaissait un accroissement important ; et derrière les promesses de campagne de Hollande d’un effort sans précédent en direction de la jeunesse et la proclamation par le gouvernement d’une stabilité budgétaire pour l’enseignement supérieur, la réalité est celle d’un appauvrissement généralisé de la formation universitaire, puisque la seule variable d’ajustement pour atteindre les objectifs budgétaires est la réduction de la masse salariale du personnel enseignant. Ainsi, dans notre seule université, les chiffres parlent : en 2015, il y a eu, à l’Université de Rennes 1, 78 postes vacants, dont 58 publiables, et parmi lesquels 36 seulement ont été ouverts, soit un total de 42 postes non pourvus ; en 2016, il y a 61 postes vacants, parmi lesquels 44 publiables, et seuls 19 seront ouverts, soit le même total de 42 non pourvus.

Pour toutes ces raisons, les enseignants-chercheurs de l’UFR de philosophie seront en grève les jeudi 3 et vendredi 4 décembre 2015, à l’unanimité, pour la première fois depuis des temps immémoriaux.”

(Commentaire des derniers mots par la rédactrice d’Academia : mais n’ont-ils donc pas fait grève en 2009 ? Croyaient-ils que leurs bonnes notes allaient les sauver ?)