Accueil > Revue de presse > "Colères universitaires" par Jean Fabbri, secrétaire général du SNESUP-FSU, (...)

"Colères universitaires" par Jean Fabbri, secrétaire général du SNESUP-FSU, "L’Humanité" du 22 novembre 2008

mardi 25 novembre 2008, par Elie

Pour lire cet article sur le site de "L’Humanité"

Pourquoi le grand débat national sur l’enseignement et la recherche est nécessaire ?

Hors champ des projecteurs si facilement focalisés sur la seule ministre de l’Enseignement supérieur, le monde universitaire s’émeut et se met en mouvement. Ce qui indigne aujourd’hui un nombre croissant de ceux qui font et vivent l’enseignement supérieur français touche deux fois au coeur de ses missions et de ses libertés.

Lié à la prétendue réforme du lycée avancée par Xavier Darcos, aux conséquentes suppressions d’emplois d’enseignants organisées par le budget 2009, le dispositif de modification des conditions de formation et de concours pour les métiers d’enseignants du premier et du second degré bouleverse les formations universitaires. Ce processus élaboré par les deux ministres Valérie Pécresse et Xavier Darcos, obtempérant avec zèle à une parole présidentielle, engage pour nombre d’universités l’avenir même de leurs formations (3e année de licence et cycle master) quant à leurs contenus scientifiques, leur organisation dans le temps, leur cohérence et complémentarité à l’échelle académique et nationale. Cette réorganisation précipitée ne conduit pas à l’amélioration de la formation des enseignants qu’elle avance comme objectif. Elle met en concurrence au lieu de solidariser les dimensions disciplinaires, didactiques et professionnelles, elle jette par-dessus bord l’expérience et le potentiel des IUFM… et elle repousse au-delà de bac + 5 le premier salaire des étudiants aspirant à enseigner.

Dans la majorité des conseils d’administration des universités (tous ceux ou presque qui ont eu à en délibérer) le dispositif masterisation-concours est contesté et est réclamé le temps d’un véritable débat. Un appel fédérateur national « L’éducation nationale en danger. Pour une vraie formation des enseignants » regroupe associations, sociétés savantes, syndicats, personnalités, pour le retrait du projet actuel et un moratoire significatif permettant l’ouverture de ce grand débat national. Élaborer des positions acceptées par la majorité des acteurs de la formation des enseignants est le seul gage de réussite.

Dans la foulée de la loi LRU, le gouvernement entend dans le même temps, « dénationaliser » le statut des enseignants-chercheurs. Ainsi seraient confiés aux seuls présidents d’université - dans un localisme absolu - les recrutements, conditions de travail, rémunérations, avancements et primes des enseignants-chercheurs (professeurs et maîtres de conférences) !

Les libertés scientifiques ne peuvent qu’être malmenées par un arbitraire local, largement sous l’influence des logiques dites d’innovation qui font des seules entreprises les pilotes des choix scientifiques au détriment des recherches fondamentales aux rythmes aléatoires et de tout l’éventail des lettres et sciences humaines. Des assemblées générales tenues dans la quasi-totalité des universités le 13 novembre démontrent la colère, la volonté d’intervenir pour inverser les logiques gouvernementales, des personnels et des étudiants.

C’est aujourd’hui indispensable pour nos libertés, pour le service public. Les batailles « respect pour le statut d’enseignant-chercheur » et « pour une vraie formation des enseignants » peuvent rencontrer des milliers de signatures (1). Le SNESup y appelle les universitaires, les étudiants, les démocrates. La grève et les manifestations dans l’ensemble de l’éducation ce 20 novembre en sont un puissant jalon.

(1) http://www.appeldu8novembre.fr

http://www.recherche-enseignement-superieur.fr/