Accueil > Revue de presse > De Pantin à Rodez, parents d’élèves en campagne, par V. Soulé, Libération, 12 (...)

De Pantin à Rodez, parents d’élèves en campagne, par V. Soulé, Libération, 12 mars 2010

samedi 13 mars 2010

Le prof absent est la hantise des parents. Qu’il se retrouve en permanence ou affecté dans une autre classe, l’enfant risque de perdre son temps. Et cela inquiète alors que la réussite se prépare de plus en plus tôt. Avec les suppressions de postes, le remplacement est ainsi devenu un véritable combat, y compris judiciaire. Lassés d’un dialogue qui ne débouche pas ou de fausses promesses, des parents vont désormais devant les tribunaux. Et les dernières annonces du ministre de l’Education, Luc Chatel, ne devraient pas apaiser leur colère. Certains ont tout de même salué le geste : le ministre reconnaît enfin l’ampleur du problème. Mais les solutions proposées - faire appel « au pied levé » à des étudiants ou à des retraités de l’Education nationale - laissent sceptique.

Le père d’une élève de Pantin, en Seine-Saint-Denis, Daniel Garault a donné le coup d’envoi de la campagne. Le 22 février, il a envoyé une lettre au tribunal administratif pour protester contre tous les jours de cours manqués par sa fille, en CE1 à l’école Joliot-Curie. Depuis son CP, Adèle a connu 18 profs - en congé maternité, remplaçants à temps partiel, remplaçants de remplaçants, etc. Il reconnaît s’être inspiré d’un précédent dans le lycée professionnel où lui-même travaille : une mère d’élève, exaspérée d’attendre un prof d’anglais, a écrit au tribunal administratif. Deux jours plus tard, le prof débarquait. A Joliot-Curie, le même miracle s’est produit. Un instituteur a été nommé. Mais la dynamique est lancée. Cinquante parents de Pantin ont envoyé un recours au ministre de l’Education, étape obligée avant une plainte au tribunal. Des dizaines d’autres pourraient suivre. La FCPE (première fédération de parents d’élèves) de Seine-Saint-Denis a mis des avocats à leur disposition.

A l’autre bout de la France, dans l’Aveyron, des parents préparent les mêmes démarches. Au lycée Foch de Rodez, les élèves de la filière pro n’ont pas eu cours d’anglais de tout le premier trimestre, faute de prof. Au lycée Jean-Vigo de Millau, l’enseignante de maths est partie en congé maternité. Après plusieurs semaines, un ingénieur a été recruté. Mais, au bout d’un mois, l’inspecteur a tranché : il ne s’en sort pas. Les parents de la FCPE s’y sont alors mis. Ils ont déniché un prof de maths travaillant dans le privé qui, lui, fait l’affaire. « C’est une aberration de devoir se transformer en chasseur de têtes », explique Joël Amouroux, responsable local de la FCPE. D’après lui, les plaintes devant les tribunaux ne résoudront pas le problème de fond : « On ne pourra pas inventer des profs qui n’existent plus à cause des suppressions de postes. »


Voir en ligne : Libération