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Passage en force à l’Université de Lille ou comment se passer de la "base" pour constituer un comité de sélection en vue du recrutement d’un poste de chaire mixte CNRS/université

mercredi 18 mars 2009

L’histoire commence le vendredi 13 février. Ce jour-là, les viviers de la 31ème section (Université de Lille) devaient se réunir pour se prononcer sur l’élaboration d’un comité de sélection destiné au recrutement de Maître de Conférence (MDC) associé à une chaire mixte Université-CNRS. Au cours de cette première réunion de concertation, plusieurs collègues se sont exprimés pour rappeler les problèmes créés par ces chaires, tels que la suppression de 25% des postes au concours 2009 de recrutement de Chargé de Recherche (CR2) du CNRS par rapport à 2008 entraînant mécaniquement à terme l’extinction du corps des CR (une chaire créée = un poste de CR supprimé) et le risque de dissensions engendrées par ces chaires à l’échelle des laboratoires, tant sur le plan humain que professionnel du fait des fortes inégalités (salaires plus élevé, primes diverses, décharge d’enseignement…) qu’elles instaurent entre les personnels. Ces remarques reposaient sur de nombreux avis émanant notamment d’instances représentatives du CNRS, dont le Conseil Scientifique du CNRS et le C3N mêmes. Au terme de cette discussion, la question suivante a été mise au vote : « Le vivier doit-il faire une proposition de comité de sélection pour ce poste de chaire mixte Université – Organisme ? ». Le résultat du vote fut sans appel (oui : 8 / non : 20 / blanc : 4). Conformément à ce vote, il a donc été décidé de ne pas faire de proposition de comité de sélection pour cette chaire.

L’histoire n’est pas terminée. Comme dans toute bonne série télé, les acteurs reviennent la semaine suivante.

Le 20 février donc, le vivier est de nouveau sollicité pour prendre position sur ce poste. On nous explique alors que, sans revenir sur le vote du vendredi 13, il serait quand même bien de proposer un jury pour le cas où le poste MDC serait dissocié de la chaire. En réponse de quoi, et en l’absence de toute garantie, les membres du vivier ont réaffirmé la position qui était la leur à la précédente réunion : le refus de faire une proposition de comité.

Quelques jours plus tard, le 2 mars, il revenait à l’UFR de Chimie de se prononcer sur le comité de sélection retenu pour cette chaire et le conseil votait la proposition suivante à l’unanimité moins 1 voix contre : « Le Conseil d’UFR approuve la décision des viviers 31 de ne pas proposer de Comité de Sélection associé à une chaire mixte Université/CNRS. Il propose d’étendre cette décision à l’ensemble des sections relevant de l’UFR de Chimie. »

Comme les meilleures histoires doivent inclure quelques rebondissements, après une réunion de mise au point entre l’équipe de direction de l’université, le directeur du laboratoire d’accueil, le directeur de l’UFR et les animateurs des viviers, une 3ème réunion est programmée le mercredi 11 mars, nous sommant de nous prononcer sur une proposition de jury. Soulignons les conditions dans lesquelles a été organisée cette réunion initialement programmée au bâtiment C1 puis inopinément déplacée à l’UFR de chimie. La précipitation n’est gage ni de sérénité ni de qualité des débats. Au cours de cette réunion, il a été clairement expliqué que le vivier n’avait pas à juger de l’opportunité de la chaire, ce qui est du ressort du CS et surtout du CA, mais que son rôle se limitait uniquement et strictement à faire remonter une proposition de comité de sélection. Pour décrypter le message, peu importe l’avis de la base, par qui se fait réellement le travail de recherche, des collègues plus intelligents savent bien mieux ce qui est bon pour l’Université. Un vote a donc finalement eu lieu, après le départ de plusieurs collègues ulcérés par ces méthodes, sur la base d’un jury proposé par le laboratoire d’accueil de la chaire. Résultats : 7 pour, 2 contre et 12 personnes qui ne prennent pas part au vote. Passons sur le quorum non atteint – recommandé mais pas nécessaire selon les textes nous a-t-on dit ! – nous avons assisté cet après-midi, médusés, à un simulacre de démocratie qui en dit, malheureusement, long sur ce qui nous attend dans les prochaines années si nous laissons de telles pratiques s’instaurer.

L’histoire est terminée ! Ce serait bien triste ! Que va faire le conseil de l’UFR de chimie qui devrait en principe se prononcer aussi ? Que va faire le conseil d’administration à l’examen de cette procédure grotesque ? et surtout…Que deviendra le futur collègue recruté dans de telles conditions alors qu’il n’est pas certain que les promesses affichées, alors que les décrets ne sont toujours pas parus, seront tenues ?