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La coordination des universités se réunit demain à la Sorbonne, par S. Huet, Sciences2, 28 avril 2009

mardi 28 avril 2009, par Mathieu

Pour lire l’article sur le blog de S. Huet.

Après la manifestation parisienne de cet après-midi, les universitaires préparent une coordination nationale demain, à la Sorbonne. A l’instransigeance gouvernementale ont répondu plusieurs votes sur la poursuite de la grève des cours, essentiellement dans les universités de Sciences humaines et sociales de la région parisienne.

La question des examens et de la validation du semestre monte, avec une pression accrue des présidences d’université. Faut-il ou non menacer de les mettre en cause ? C’est l’une des questions que les universitaires ont à résoudre. Mais la principale demeure : comment continuer à s’opposer à la politique du gouvernement puisque ce dernier semble déterminé à mettre en oeuvre ses décisions sans tenir compte des oppositions ?

La manifestation de cet après midi, à Paris, reflète l’état pour le moins étrange de la situation. Commencée avec une affluence réduite et dans une ambiance plutôt tristounette, elle a vu le nombre de manifestants doubler sur le trajet, puis retrouver des manifestants qui avaient décidé de démarrer leur marche à Port Royal, puis l’ambiance monter lorsque le cortège des universitaires a rejoint celui des personnels hospitaliers à Port Royal. Manifestement heureux de se cotoyer, les deux cortèges ont fusionné et les conversations ont fusé sur leurs raisons respectives de se trouver là. « Finalement, la question commune que nous posons, c’est le rôle que l’Etat doit jouer dans les services publics, de la santé comme de l’éducation et de la recherche », me confie Françis-André Wolmann (biologiste, Cnrs). « Et notre colère commune, c’est que ce gouvernement met en cause profondément la conception que nous avons de nos métiers, fondée sur des valeurs de service public. » D’où la « rebellion conceptuelle » qu’il veut voir dans ce mouvement... dont la caractéristique principale est finalement qu’il est tout à la fois dur et mou : dur par sa durée, mou par ses formes, très respectueuses de la légalité et de l’ordre public.

La conjonction des deux cortège aura permis cette image, souligne goguenard un manifestant, de « cette ligne de mandarins de médecine, gueulant que la santé et l’université ne sont pas des marchandises ». La plupart des universités sont représentées par des groupes constitués et identifiés, je relève également des banderoles de l’ENS, de l’EHESS, de l’INALCO, les psychologues de P-5 Descartes, des physiciens de Paris-6, l’UFR Lettres et arts de Paris-7, de l’Observatoire de Paris... Couvert de perruques blondes, un rang proclame qu’ils sont des "Princesses de grève". Ni moumoute ni soumises, proclament d’autres perruqués. Les enseignants et étudiants des études ibériques de Paris-3 lancent leurs slogans en espagnol, pimenté d’un clin d’oeil au « pueblo unido... » des années de l’Unité Populaire chilienne. Nanterre est toujours « en colère » et ne se « laissera pas faire ».

Les informations recueillies auprès des manifestants ne permettent pas de penser que le mouvement de contestation va s’arrêter là, même si ses formes pourraient évoluer. Ainsi, étudiants et enseignants de Paris-4 Sorbonne me confirment qu’ils ont bien tenu une assemblée qui a décidé de la poursuite de la grève. Même discours de Michel Bernard (Paris-3, Snesup) qui précise qu’une assemblée d’universitaire a bien voté la poursuite de la grève des cours. « Il y a une forte minorité pour limiter la grève aux jours de manifestation. Une réaction au forcing de l’adminstration pour tenter de maintenir la fiction d’une reprise des cours et de la tenue d’examens dans les délais initiaux, mais cela n’est tout simplement pas réaliste Nous sommes très divisé sur la manière dont nous devons réaliser l’évaluation du second semestre. Nous voulons faire pression sur le gouvernement par des menaces crédibles, mais d’un autre coté nous ne voulons pas pénaliser les étudiants outre mesure. De toute façon, le redoublement massif est impossible, nous n’aurions pas les locaux pour accueillir de nouveaux étudiants si on s’orientait vers une telle décision. » Un de ses collègues, Stéphane Boisard, insiste auprès du journaliste : « si on en est là, c’est aussi en raison du passage en force du gouvernement avec la publication du statut durant les vacances. En réalité, les problèmes de fond ne sont pas réglés. »

Aline Cohen Delara, maitre de conférence à Paris-5 Descartes, spécialiste de la schizophrénie et de l’hyperactivité dans sa pratique clinique, fait part de son souci pour les 4 000 étudiants de l’UFR dans sa grève des cours. « Nous avons maintenu l’encadrement des stages, des mémoires, diffusé les cours sur le net, donné des lectures, je vois les étudiants à la cafétéria et lors des cours alternatifs. Nous venons de décider de la date des examens en Assemblée générale. Mais je nous sens piégés par notre honneteté, vis à vis de l’Université et des étudiants. Nous avons mené nos actions en essayant de les pénaliser au minimum, et le résultat c’est que le gouvernement ne nous a pas écouté. Pire, nous venons de recevoir une lettre d’Axel Kahn dans laquelle il nous rappelle que les textes lui permettent de punir la rétention des notes de retenues salariales. »

Olivier Beaud, sous la banderole du collectif "Défense de l’Université", réitère l’analyse qu’il fait de la dernière version du décret sur le statut des universitaires. « Nous avions envoyé un mémo au Conseil d’Etat pour qu’il lève l’ambiguité du texte ministériel quant à la rémunération des heures effectuées dans le cadre d’un service modulé. Il l’a fait... mais en rédigeant une formule qui permet de dire que les heures effectuées dans ce cadre au delà du service de référence ne seront pas payées en heures complémentaires. » Ce qui est vraiment bizarre dans cette affaire, c’est que le ministère, interrogé par ma consoeur de France-Inter Sophie Becherel, soutient mordicus qu’Olivier Beaud se trompe et que le texte oblige à rémunérer toute heure effectuée au delà des 128 et 192 heures du service de référence. Va t-il falloir attendre que le cas survienne dans la réalité pour que l’on sache qui dit la vérité ?