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Pour les enseignants-chercheurs, "le combat continue" - Laurent Mouloud, L’Humanité, 2 mai 2009

lundi 4 mai 2009, par Laurence

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Le monde de l’éducation était présent hier dans le cortège parisien. Toujours déterminé à en découdre, après treize semaines de mobilisation.

« Tout le monde sait que le mouvement universitaire n’est pas mort… » Il est 15 heures sur la place Denfert-Rochereau. Et Anne-Monique, secrétaire pédagogique à la faculté Paris VIII, jette un coup d’oeil sur les ballons syndicaux qui flottent sous le soleil parisien. En ce 1er Mai, la mobilisation des enseignants et chercheurs n’a pas atteint les sommets du mois dernier. Pas de quoi décourager cette quinquagénaire, sous sa casquette à carreaux. « Cela fait trois mois qu’on lutte, et personnellement je suis prête à aller beaucoup plus loin. On veut nous imposer un changement de société sans précédent, ce n’est pas le moment de freiner ! »

Mercredi dernier, la Coordination nationale des universités a appelé à poursuivre la grève dans les établissements et à boycotter l’organisation des examens, y compris du baccalauréat. Une décision controversée. Anne-Monique, elle, approuve. « À situation révolutionnaire, remède exceptionnel. De toute façon, les enseignants sont des gens responsables. Et s’il faut faire passer les examens en septembre, ils le feront. » À Paris-VIII, l’une des universités les plus mobilisées depuis janvier, les enseignants-chercheurs continuent la rétention des notes du premier semestre. Comme dans une cinquantaine d’autres facs qui restent en grève totale ou partielle.

Dans le cortège, beaucoup s’en prennent à l’attitude de Valérie Pécresse, la ministre de l’Enseignement supérieur, qui minimise le mouvement et ne veut rien lâcher. « Elle cherche à étouffer la contestation et ne recule toujours pas sur l’essentiel, s’agace Corinne Sagliet, professeur de biologie-géologie à Paris. Franchement, ce mépris, après treize semaines de mobilisation, est particulièrement choquant. On a l’impression d’être considérés comme des clodos ! Moi, je gagne 2 000 euros par mois après trente ans de carrière. Et avec mes trois enfants, je peux vous dire que ce n’est pas facile… »

Sous une banderole « Paris-I en grève », Marie Cottrell, responsable du SNESup-FSU dans cet établissement, rappelle, elle, que la mobilisation a commencé à payer sur le statut des enseignants-chercheurs, dont la circulaire d’application a été publiée jeudi. « Mais tout reste à faire sur la question des moyens ou encore du démantèlement des organismes de recherche. » Quant à la réforme de la formation des enseignants, c’est la grande inquiétude. « Le décret est sorti hier (jeudi - NDLR), et nulle part ne figure le mot IUFM, explique Marie Cottrell. On parle seulement « d’établissement d’enseignement supérieur » sans préciser si c’est public ou privé. On voit aussi que l’année de stage rémunéré disparaît et que l’on n’a aucune précision sur ce qui arrivera aux étudiants qui passent le master enseignant mais ratent le concours… » Pour elle, cela ne fait aucun doute : le « combat continue ».

Assise sur un muret, Catherine ne dit pas autre chose. Directrice d’école primaire à Bobigny (Seine-Saint-Denis), elle est venue une nouvelle fois pour défendre le service public de l’éducation, menacé de toute part. Dans sa commune, cinq postes de RASED (réseau d’aide aux enfants en difficulté) sur quatorze disparaissent à la prochaine rentrée, tandis que ne subsiste plus qu’une classe et demie de « tout-petits ». « Et ce alors que 600 enfants de deux ans et demi étaient en attente de scolarisation cette année, souffle-t-elle. On externalise de plus en plus les missions de l’école. Et cette idéologie libérale, je ne peux l’accepter. »

Laurent Mouloud