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Revue de presse britannique : les divisions de la gauche étudiante et les conséquences de l’austérité - 3 novembre 2010

mercredi 3 novembre 2010, par Elie

Merci au préparateur de cette revue de presse.

La réaction étudiante de gauche a du mal à s’organiser, avec une tension entre les différentes chapelles qui est maintenant assez typique de ce qui se passe dans beaucoup de conflits en Europe. Face à l’augmentation des droits universitaires que va décider le gouvernement britannique, faut-il se limiter à chercher l’union en limitant la contestation aux coupes budgétaires, ce qui risque de laisser la main libre à différentes modalités de taxation des étudiants, ou bien faut-il réaffirmer l’importance de la gratuité de l’enseignement supérieur ? Telle est la ligne de fracture que décrit ce compte rendu d’une conférence qui aurait réunie prêt de 400 étudiants :

http://anticuts.com/2010/11/02/ean-conference-report/

Cela rappelle les atermoiements du parti socialiste et de la gauche sur la réforme des retraites, la durée de cotisation et les âges de la retraite, ainsi que sur la place des fonds de pensions. Il est aussi intéressant de constater que c’est, en Angleterre, le Socialist Worker Party, qui se declare anti capitaliste, qui d’après ce compte rendu freine sur l’unité autour de la gratuité de l’enseignement superieur.

Plus de nouvelles d’Oxford, dont la présidence a trouvé par un savant calcul que le nouveau régime des droits d’inscription mettait en danger l’établissement : Oxford et Cambridge ont en effet un système d’enseignement en très petits groupes, où un enseignant suit les étudiants un par un, et donc des coûts très élevés qui sont chiffrés à £16.000 par an et par étudiant, quelle que soit la discipline. Le nouveau système, où les humanités (ce qui inclut en Angleterre le Droit, l’Economie, et la licence Philosophie, Politique et Economie que suivent les jeunes gens qui envisagent de faire de la politique) ne seront plus subventionnées, représente un vrai problème pour les universités d’élite : dans un marché où les droits d’inscription sont dérégulés, elles ne pourront pas forcément faire payer le maximum du fait de la concurrence d’universités "moins prestigieuses" qui n’utilisent pas ce système de tutorat très coûteux :

- http://www.bbc.co.uk/news/education-11642373
- http://www.guardian.co.uk/education/2010/oct/27/oxford-university-education-funding

Heureusement, Oxford vient de lever £1 milliards de donations et n’est donc pas tant à plaindre

http://www.guardian.co.uk/education/2010/oct/29/oxford-gets-1bn-from-donors

Après les étudiants de la prestigieuse Oxford mais aussi de la moins prestigieuse Oxford Brookes, c’est au tour des étudiants de la prestigieuse London School of Economics de virer des politiques :

http://www.bbc.co.uk/news/education-11675502

Le gouvernement met la pression sur sa réforme des frais d’inscriptions : les coupes budgétaires pourraient commencer AVANT 2011-2012, date à laquelle les nouveaux frais d’inscription commenceraient à être perçus. L’idée est sans doute que les personnels et les étudiants d’université exsangues seront moins enclin à s’opposer à la réforme.

http://www.timeshighereducation.co.uk/story.asp?sectioncode=26&storycode=414041&c=1

Le gouvernement a maintenant annoncé sa ligne directrice pour les droits d’inscriptions : deux palliers, un à £6.000, qui peut être dépassé jusqu’à un maximum de £9.000 si l’université justifie d’une action en faveur des minorités (ça doit être ça l’austerité juste), sachant que dans l’ancien système, le cumul des droits payés par l’étudiant et de la subvention de l’Etat tournait aux alentours de £7.000. Les frais ne seront pas payés directement mais remboursés via un emprunt consenti par l’Etat dès que le salaire de l’ex-etudiant dépassera £21.000. Le taux d’intérêt de cet emprunt serait de l’inflation + 3%, avec des modalités "adoucissantes" en cas de problèmes pour rembourser. Le remboursement mensuel serait plafonné à 9% par an. Des pénalités pour remboursement anticipé, ce que pourraient se permettre des étudiants riches, sont envisagées (c’est l’austerité juste), mais ce n’est pas encore très clair (cette austerité pourait donc ne pas être si juste ?). Un régime plus favorable que précédemment semble être envisagé pour l’emprunt couvrant les frais quotidens (à nouveau l’austerité juste).

- http://www.bbc.co.uk/news/education-11677862
- http://www.timeshighereducation.co.uk/story.asp?sectioncode=26&storycode=414125&c=1
- http://www.guardian.co.uk/education/2010/nov/03/willetts-announces-fees-of-9000

Pour les uns, c’est clairement une réforme "néolibérale". En effet, ce sera l’étudiant-consommateur-acteur, avec le fardeau de sa dette sur le dos, qui dictera le fonctionemment du marché, guidé par des frais d’inscriptions fixés par le marché ainsi que par l’information fournie par l’enquête gouvernementale de satisfaction étudiante et par la presse. Stefan Collini note cependant, dans la London Review of Books, que la confiance dans le marché s’effrite assez vite. Que se passerait-il si les étudiants n’étaient pas attirés par les sciences ou la médecine ? Et bien c’est très simple, on subventionnerait ces disciplines de façon à ce qu’elles deviennent moins chères et continuent à attirer l’étudiant-consommateur-acteur, pour l’empêcher de faire des "choix irrationnels".

http://www.lrb.co.uk/v32/n21/stefan-collini/brownes-gamble

Et, à propos, que dit le marché du travail sur la demande d’étudiants des différentes disciplines : et bien ce n’est pas très bon pour les sciences de l’ingénieur et l’informatique, des secteurs qui connaissent les dégradatations les plus importantes de l’emploi étudiant.

- http://www.guardian.co.uk/business/2010/nov/01/graduate-unemployment-highest-for-17-years
- http://www.bbc.co.uk/news/education-11652845
- http://www.timeshighereducation.co.uk/story.asp?sectioncode=26&storycode=414046&c=1

Mais ce n’est pas très bon pour tout le monde, avec le plus haut taux de non emplois en sortie d’étude depuis 17 ans.

La pression à la baisse de la qualité de l’enseignement semble aussi s’accentuer, avec le développement de l’enseignement basé sur
des formations à distance (principalement l’université de Londres). L’opérateur privé Kaplan avait déjà mis en place ce type d’enseignement, où un étudiant s’incrit dans une formation à distance qui va aussi donner les examens, mais où l’étudiant dispose d’un "enseignement light" pour l’aider. C’est au tour des lycées de débuter ce genre de formations :

http://www.timeshighereducation.co.uk/story.asp?sectioncode=26&storycode=414022&c=1

Bon, à part ca, si votre ministre ou votre président d’université vous en rabâche avec le processus de Bologne, c’est un idiot. Il ferait mieux de s’intéresser à ce qui se passe dans son environnement immédiat, c’est du moins ce que dit ce président d’un groupe de consultants canadien :

http://www.timeshighereducation.co.uk/story.asp?sectioncode=26&storycode=414020&c=1

Une recherche récente montre que le meileur moyen d’attribuer les promotions serait peut-être de le faire au hasard :

http://www.guardian.co.uk/education/2010/nov/01/random-promotion-research

Nos ministres vont-ils se mettre à jouer aux dés ?