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Universités du troisième type - JF Méla, JFM’s blog, 21 février 2012

vendredi 24 février 2012, par Mariannick

…"Par le biais du cahier des charges de ce concours des IDEX et des projets retenus, c’est la nature même des universités françaises, de leur organisation et de leur gouvernement, qui serait profondément modifiée, en dehors de toute disposition législative et de tout débat démocratique interne."

Le précédent article traitait de l’avenir de la LRU. Mais est-il encore pertinent de poser par ce biais la question du devenir des universités françaises, après la publication des projets d’IDEX sélectionnés au terme des deux vagues d’appels à projets ? Après la première vague j’avais publié un article intitulé « PRES et IDEX : Farces et attrapes » où je mettais en évidence, sur des exemples parisiens, le caractère arbitraire, parfois même absurde, de ce qui apparaissait un peu comme un « loto ». A propos de la LRU, j’ai souligné combien les investissements d’avenir, et tout particulièrement les IDEX, étaient en contradiction avec le principe d’autonomie des universités. Par ailleurs il y a déjà eu ici des « débats autour de la politique d’excellence ».

Mais c’est un autre aspect que je voudrais relever aujourd’hui : par le biais du cahier des charges de ce concours des IDEX et des projets retenus, c’est la nature même des universités françaises, de leur organisation et de leur gouvernement, qui serait profondément modifiée, en dehors de toute disposition législative et de tout débat démocratique interne. Si ce processus allait à son terme, on pourrait parler de « coup de force ». Mais il est plus probable que ces « universités du 3ème type » que de petits comités ont travaillé à dessiner en toute opacité, ne verront pas le jour, en tout cas pas sous la forme décrite dans les projets les plus technocratiques. Je me contenterai de prendre comme exemples le projet UNITI (Université de Toulouse) porté par le PRES Université de Toulouse, et le projet USPC (Université Sorbonne Paris Cité) porté par le PRES Sorbonne Paris Cité.

L’UNIVERSITÉ DE TOULOUSE (UT)

Les citations du projet sont en italiques.

Le projet UNITI est sans doute le plus formalisé, mais aussi le plus risqué, car il se propose de fusionner d’ici 2018, 12 établissements autonomes, dont 4 grandes universités, dans quelque chose qui ne serait pas une université, mais un grand établissement, l’Université de Toulouse (UT), qui serait créée début 2013, ce qui implique d’abord la suppression du PRES, puis celle de tous les conseils d’administration des établissements partenaires en 2018. Dès l’été 2012, toutes les instances de gouvernance de l’UT seront créées ou préfigurées, anticipant la création juridique du grand établissement.[…]

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L’UNIVERSITE SORBONNE PARIS CITE (USPC)

Le seul texte disponible est principalement en anglais.
Il y aura donc quelques citations en anglais.

L’USPC est un mastodonte encore plus impressionnant que l’UT : 120.000 étudiants, 6.600 enseignants-chercheurs et chercheurs, 5.800 personnels administratifs et techniques. On nous dit que les 8 institutions (dont 4 universités) qui composent le PRES actuel ont décidé d’aller vers la construction d’une seule nouvelle université, d’ici 4 ans. Pour bien connaître la situation dans l’une des universités partenaires, je n’ai pas le sentiment que cette décision ait été clairement assumée… Ailleurs dans le texte, on parle d’ailleurs des résistances de la communauté académique à changer (USPC must build a common sense of identity). On ne dirait pas que ce sont les représentants de ladite communauté qui parlent…

[…]

EN GUISE DE CONCLUSION

Voilà donc, à la faveur d’un programme d’investissements, une « réforme » assez radicale de l’organisation des universités françaises, ou plutôt de certaines d’entre elles, qui se dessine et qui échapperait au contrôle parlementaire. Toutes les idées avancées ne sont pas à rejeter, mais cette « réforme » concentre des dysfonctions technocratiques évidentes. A la lecture des projets complexes sélectionnés par le « jury international » des IDEX, on a les plus grands doutes sur la capacité d’un tel jury d’une vingtaine de membres, épisodiquement réuni, à en juger. Au-delà de l’appréciation qu’on peut porter sur les qualités scientifiques des ensembles en question, il s’agit de questions de politique universitaire qui dépassent les compétences d’un jury.

Ces projets visent avant tout à obtenir de l’argent du « Grand Emprunt ». Ils sont rédigés un peu à l’écart des réalités par un petit nombre de gens qui parachutent des solutions techniques détaillées, avec peu de souci du débat public et du jeu de l’autonomie universitaire. Ils apparaîtront certainement comme des provocations à tous ceux qui se sont mobilisés, à tort ou à raison, contre les réformes de 2006-7, ce qui ne nous fera guère progresser.

Ces projets suivent une logique institutionnelle très liée à la logique des IDEX. A la différence d’autres investissements d’avenir comme les LABEX, il est très difficile de dissocier le financement des IDEX de la mutation institutionnelle qu’ils entendent accompagner dans les universités. Il sera donc très difficile de se contenter de donner l’argent et de passer à la suite.