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Démission d’un élu étudiant du CA de l’université Paris 8 - 31 mai 2013

vendredi 7 juin 2013

Madame la présidente, messieurs-dames, je vous présente ma démission de représentant des étudiants au Conseil d’Administration. Je tiens à vous préciser brièvement ici ce qui m’a poussé à prendre une telle décision.

L’assujettissement de l’Université à la loi du marché comme les moyens mis en œuvre pour y parvenir (la pyramidalisation de la communauté universitaire qu’on appelle « gouvernance », le flicage qu’on appelle « évaluation », la déprise à laquelle conduit ce que le Ministère appelle « autonomie » etc). Tout ceci sépare et divise chaque jour davantage ce qui reste de ce qu’on appelle encore communauté universitaire. Tout ceci dégrade le quotidien de chacun-e, en dépit des chiffres positifs évoqués aujourd’hui même.
Les conséquences d’une telle politique sont une insulte à la pensée et l’intelligence, qui ne se réduisent pas à ce à quoi l’idéologie ambiante veut les contraindre. Je suis bien conscient que cela est dû en grande partie au cadre ministériel, à la LRU et au processus de Bologne, mais Madame la présidente, ce qui est voté ici y collabore activement. Et tout le monde sait ici que le Ministère de la Recherche du PS vous a remis, il y a peu, le grade de Chevalier de la légion d’honneur.

Au sein de ce conseil, parfois du fait de l’urgence, tout semble fait pour que l’opposition reste silencieuse :
- 1. Des documents de plusieurs dizaines de pages nous sont régulièrement envoyés quelques jours avant les conseils, ce qui nous empêche de travailler les dossiers. Rien n’a évolué sur ce point malgré plusieurs demandes, et ceci dans la relative indifférence des représentant-e-s de la liste de la présidence.
- 2. Si, malgré tout, nous parvenons à travailler les points à l’ordre du jour, Madame la présidente, vous choisissez les questions auxquelles vous voulez répondre, et vous n’objectez parfois rien aux arguments avancés. Ceci bien que les interventions soient généralement constructives et exprimées calmement.
- 3. Dans ce contexte, en général, seules 5 personnes sur la vingtaine présente s’opposent à ce que vous présentez (en votant contre ou s’abstenant). Je serais curieux de savoir combien de personnes ici présentes lisent et travaillent les documents envoyés. Je serais également curieux de connaître ce qui pousse chacun-e à siéger ici.

Nous sommes dans une chambre d’enregistrement de décisions prises par d’autres que nous, ces autres étant des experts complètement coupés de la réalité vécue par les universitaires.
Les postulats conduisant aux décisions de ces experts ne sont pas questionnables, et leurs conséquences ne sont pas discutables.

Notre seule latitude consiste à négocier la couleur des barreaux de la prison ou du mouroir que devient l’Université, et à tenter de limiter les abus de pouvoirs en cas d’irrégularités comme de fausses procurations. Ce n’est pas à un devenir flic que j’aspirais en prenant mes fonctions au sein de ce conseil d’Administration.
J’attendais un peu moins de vulgarité de la part d’universitaires sous la politesse apparente, et l’Université qui se détruit dans ces conseils me dégoûte profondément.

Je démissionne parce que je ne veux pas être associé à cette forme d’Université qui se construit.
Je démissionne car je ne veux plus participer à la parodie de démocratie que sont ces conseils – et pas uniquement à Paris 8, j’en suis bien conscient. Je ne veux pas, par ma présence, servir de caution à un fonctionnement que trop d’étudiants et de personnels croient démocratique parce qu’ils ignorent ce qui s’y déroule.
Je démissionne parce que ce que je représente est inaudible dans ces conseils.

A. PEQUIGNOT, élu étudiant (liste M.U.R.) au Conseil d’Administration de Paris 8.
31 mai 2013.