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Projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants - Audition de Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation - 17 janvier 2018

vendredi 19 janvier 2018, par Laurence

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Nous procédons aujourd’hui à l’audition de Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants.

Depuis plusieurs années, nous assistons à des rentrées universitaires quelque peu apocalyptiques. Nous nous sommes emparés de cette question et, avant l’été et après chaque rentrée universitaire, rencontrons systématiquement le ministre pour dresser un bilan et lui exposer nos préoccupations. Celles-ci se font chaque fois plus fortes.

Depuis votre dernière audition devant notre commission, madame la ministre, vous avez présenté un plan Étudiants et déposé le présent projet de loi, que l’Assemblée nationale a examiné en décembre. Pouvez-vous nous en exposer les points saillants et revenir sur les modifications apportées par nos collègues députés ?

Plusieurs sénateurs se sont émus de l’ouverture de la plateforme Parcoursup lundi dernier, avant même l’examen du texte par le Sénat. Nous aurions besoin de quelques explications sur le sujet, au-delà de la réponse qui a été apportée dans l’hémicycle hier, à l’occasion des questions d’actualité.

Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. - Lors de mon audition en octobre dernier devant votre commission et à l’occasion de l’examen des crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur », je vous ai présenté les grandes lignes de notre plan Étudiants. Le présent projet de loi est la traduction législative de ce plan, sa colonne vertébrale. Je vous remercie de me permettre, dans le cadre de cette audition, de vous exposer les intentions du Gouvernement et le contexte, très spécifique, dans lequel ce texte s’inscrit.

Vous savez tous à quelles difficultés nous avons été confrontés lors de la campagne 2017 d’Admission post-bac (APB). Le système en vigueur, très injuste, a été déclaré illégal, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) ayant mis en demeure le Gouvernement, en septembre dernier, de renoncer à toute forme de traitement automatisé pour décider de l’affectation des étudiants et le Conseil d’État ayant annulé, en décembre dernier, la circulaire permettant le recours au tirage au sort.

Nous faisons donc face à une situation juridique unique : le droit en vigueur n’est plus applicable en l’état et nous devons définir un nouveau cadre légal de toute urgence. Toutefois, cela ne doit pas nous priver des apports d’une discussion au Sénat et il importe que nous travaillions ensemble.

Des inquiétudes ont été exprimées du fait de l’ouverture de Parcoursup avant la fin de l’examen parlementaire de ce projet de loi. Cette plateforme est un simple outil et l’étape dont le cadre sera défini par la loi - celle des affectations et des inscriptions - ne s’ouvrira que le 31 mars. C’est à partir de cette date qu’il nous faudra un véhicule législatif.

Bien évidemment, le Gouvernement est attaché au respect du débat parlementaire. Nous sommes en relation avec le rapporteur depuis décembre, afin que le Sénat puisse jouer son rôle dans les meilleures conditions possible. Mais il nous fallait aussi avancer et faire en sorte que toutes les affectations dans les formations sélectives, qui ne sont pas remises en cause, puissent se dérouler selon un calendrier classique.

Au-delà de la question de la procédure d’inscription, il importe de connaître et reconnaître la réalité de l’enseignement supérieur au sein de l’université : celle d’un échec massif en premier cycle. Le projet de loi vise à répondre à cette problématique. Massifié, l’enseignement supérieur ne s’est pas pour autant démocratisé, comme en attestent le taux d’échec en première année et le faible taux - 30 % - d’étudiants obtenant une licence en trois ans.

Que voulons-nous pour notre jeunesse ? Le diplôme de l’enseignement supérieur constitue la meilleure protection contre le chômage. La hausse du niveau global de formation dans la population est un atout pour notre compétitivité, un gage de prospérité à long terme et un outil pour construire une démocratie plus saine.

Qu’en est-il de la sélection ? Le terme ne nous fait pas peur, mais le sujet n’est pas là. Notre système d’enseignement supérieur a déjà un caractère sélectif : au taux d’échec précédemment mentionné en licence, s’ajoute le fait que près de 54 % des places dans l’enseignement supérieur se trouvent déjà dans des filières sélectives.

Notre ambition est donc de permettre à un maximum de jeunes d’obtenir un diplôme - dans le cadre d’un projet adapté -, de garantir l’équité sociale, mais surtout d’assurer l’insertion professionnelle des étudiants.

Le dispositif proposé est le fruit d’une vaste concertation, ayant réuni, pendant trois mois, acteurs de la communauté de l’enseignement supérieur, parents, étudiants, syndicats, etc. Plus de 55 réunions bilatérales et 11 groupes de travail ont été organisés, représentant plusieurs centaines d’heures de discussion. Nous nous sommes ainsi assurés que les mesures proposées seraient applicables.

Je me suis également beaucoup inspirée des différents travaux et rapports traitant de la question. Je pense notamment aux travaux conduits au Sénat durant les trois dernières années : M. le rapporteur évoquait déjà la notion de prérequis dans un rapport budgétaire ; M. Guy-Dominique Kennel a beaucoup travaillé sur la question de l’orientation ; Mme Catherine Procaccia a fait adopter au Sénat, en 2014, une proposition de loi tendant à réformer le système de sécurité sociale des étudiants ; M. Jean-Léonce Dupont avait abordé ces différents sujets au sein de votre commission.

Je souhaite donc que nous travaillions de manière convergente et que nos échanges permettent de rapprocher l’ensemble des points de vue.

À nouveau, et même si j’ai conscience que nos discussions ne se limiteront pas au contenu du projet de loi, ce texte ne constitue que la partie législative nécessaire à la mise en oeuvre du plan Étudiants. Les problématiques liées à la plateforme n’entrent pas dans ce cadre.

Le projet de loi, tel qu’adopté par l’Assemblée nationale, comporte trois séries de dispositions.

Pour lire la suite comportant les questions te remarques des sénateurs.