Accueil > Statuts et précarité > Offrons des lunettes à Mme la Ministre

Offrons des lunettes à Mme la Ministre

dimanche 23 novembre 2008, par Mathieu

[([|Valérie Pécresse et le décret modifiant le statut des enseignants-chercheurs|])]

[|[*Offrons des lunettes à Madame la Ministre*]|]

Le 17 novembre, lorsqu’elle s’est adressée au CTPU [1] pour présenter sa réforme du statut des enseignants-chercheurs, Valérie Pécresse ne voyait pas bien (ou se trompait de décret).
A preuve :

3Reconnaissance de l’excellence de l’enseignement :3

- Valérie Pécresse :
« valoriser l’implication des enseignants-chercheurs dans chacune des facettes de leur métier : auprès des étudiants, […]

- Le projet de décret :
« [Le service d’enseignement] peut comporter un nombre d’heures d’enseignement inférieur ou supérieur au nombre d’heures de référence mentionné au I en fonction de la qualité des activités de recherche et de leur évaluation par le conseil national des universités […]

- Remarques :
Plus on sacrifie sa recherche à son enseignement, et plus le service d’enseignement se trouve accru. Voilà qui s’appelle valoriser l’implication auprès des étudiants.

3Respect du principe d’indépendance3

- Valérie Pécresse :
« Mais j’ai choisi de faire confiance aux enseignants-chercheurs, à chacun, de manière individuelle, dans son engagement professionnel ; de manière collective aussi, puisque ce seront les instances composées de pairs qui prendront les décisions, dans le respect du principe d’indépendance qui fait la richesse de ce statut dérogatoire »

- Le projet de décret :
« Le président ou le directeur de l’établissement arrête les décisions individuelles d’attribution de services des enseignants-chercheurs dans l’intérêt du service, après consultation, du directeur de la composante et du directeur de l’unité de recherche concernés. »

C’est donc le président, et lui seul, qui prend les décisions individuelles (l’avis du directeur de la Fac des sciences ou Fac des Lettres » n’étant que consultatif ).

Quant au Conseil d’administration, il ne fait que définir :
« les principes généraux de répartition des services entre les différentes fonctions des enseignants-chercheurs. Il fixe également les équivalences horaires applicables à chacune de ces activités ainsi que leurs modalités pratiques de décompte. »

- Remarques :
Le Conseil d’administration se borne aux principes généraux. Et le Conseil d’administration n’est composé que d’une minorité de pairs (autres enseignants-chercheurs) [2].

C’est donc un principe d’indépendance soumis au Président de l’Université, et dans le meilleur des cas à des « pairs » qui sont en majorité des non-pairs.

3Evaluation objective des enseignants-chercheurs3

- Valérie Pécresse :
« tout est lié par l’évaluation qui fonde les décisions de l’université : […] les décisions de répartition des services, qui constituent la base de la modulation de services. […] [Ces modifications] instaurent la modulation de service, fondée sur une évaluation externe, collégiale et indépendante. »

- Le projet de décret :
« Pour l’autre moitié [du temps de travail dans le cas où le président de l’université maintient moitié recherche/moitié enseignement], par une activité de recherche soutenue et reconnue comme telle par une évaluation régulière réalisée au moins tous les quatre ans par le conseil national des universités […] [Le service d’enseignement] peut comporter un nombre d’heures d’enseignement inférieur ou supérieur au nombre d’heures de référence mentionné au I en fonction de la qualité des activités de recherche et de leur évaluation par le conseil national des universités […] »

- Remarques :
Il y a donc la qualité de la recherche d’un côté, et son évaluation par le CNU de l’autre. Autrement dit celle-ci n’est pas contraignante et laisse le champ libre à toutes les fantaisies. A supposer d’ailleurs que le CNU trouve le temps d’évaluer la recherche de dizaines de milliers d’enseignants-chercheurs tous les quatre ans. Et que cette évaluation quadriennale soit cohérente avec un service fixé annuellement.

3
Enseignement à distance (nouvelles technologies, Internet etc)
3

- Valérie Pécresse :
« Au lieu d’un référentiel où : […] seule l’activité d’enseignement en présence d’étudiants était définie, sans pour autant intégrer toute la dimension de l’acte d’enseignement (utilisation des nouvelles technologies, suivi de stages..) ni l’implication dans les activités pédagogiques ou d’intérêt collectif liées, […] demain, les missions des enseignants-chercheurs seront élargies, en adéquation avec l’évolution des missions confiées aux universités par la loi, comme l’insertion professionnelle ou la formation à distance. »

- Le projet de décret :
« Ces activités [d’enseignement, définies par le pivot] s’accompagnent des heures consacrées à la préparation et au contrôle des connaissances afférentes, aux tâches d’intérêt collectif correspondant à la mission d’enseignement ainsi qu’aux actions de formation à distance, de tutorat et de suivi de stages »

- Remarques
L’enseignement à distance (par l’utilisation des nouvelles technologie, par exemple mise en ligne des cours etc) accompagne donc le service d’enseignement de l’enseignant chercheur au même titre et sur le même plan que la préparation des cours. Il n’est donc pas reconnu comme tâche à part entière, et vient s’ajouter aux charges dues au titre du service en présence physique des étudiants.

3Lutte contre le localisme3

- Valérie Pécresse :
« C’est ainsi que les établissements se préserveront des risques liés à l’arbitraire et au localisme. »

- Le projet de décret :
« Le président ou le directeur de l’établissement arrête les décisions individuelles d’attribution de services des enseignants-chercheurs […] L’avancement a lieu sur proposition du conseil d’administration de l’établissement, siégeant en formation restreinte, dans la limite des promotions offertes à l’établissement […]. Les congés pour recherches ou conversions thématiques sont accordés par le président […] »

- Remarques :
Localiser pour contrer le localisme (appelons un chat un chat, les « mafias » qui tiennent certaines universités) : oui, ah oui vraiment le localisme est bon enfant !

3Moralité3

[|Que nous soyons universitaires, chercheurs, étudiants ou simplement citoyens concernés par l’indépendance de ce lieu de fabrique et de transmission du savoir qu’est l’Université,
Que les écarts entre le discours de Valérie Pécresse et les faits nous fassent rire ou frémir,
Que nous y voyions ordinaire manœuvre politicienne ou grave attentat au pacte républicain,|]

[*Offrons des lunettes à Madame la Ministre en signant en masse l’appel*]

« Respect pour le métier d’enseignant-chercheurs ».

Vous pouvez télécharger ce texte ci-dessous, et l’utiliser comme tract.


[1Comité Technique Paritaire Universitaire. Ce discours reprend des points maintes fois exposés par la Ministre.

[2Loi LRU : « Art. L. 712-3. - I. - Le conseil d’administration comprend de vingt à trente membres ainsi répartis :« 1° De huit à quatorze représentants des enseignants-chercheurs et des personnels assimilés, des enseignants et des chercheurs, en exercice dans l’établissement, dont la moitié de professeurs des universités et personnels assimilés. »