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Rennes. Trois profs de Sciences Po renvoient leurs palmes - Marc Ollivier, Ouest-France, 20 février 2012
jeudi 23 février 2012
Jacques Harel, professeur d’anglais, Erik Neveu professeur de sciences politiques et Gilles Richard, professeur d’histoire [enseignent] à Rennes. Ils protestent contre les nouveaux programmes du lycée et souffrent du manque de moyens donnés à leur école. Ils redonnent leur médaille à leur ministre.
Cette décoration au ruban violet a été créée en 1808 par Napoléon Ier, en 1808, année de création du baccalauréat. Elle distingue des enseignants (proviseurs, professeurs) et des personnalités qui œuvrent en faveur de l’enseignement. « Je suis fier de cette décoration », dit d’emblée Erik Neveu, professeur de sciences politiques et ancien directeur de Sciences Po Rennes.
Comme ses collègues Jacques Harel (professeur d’anglais) et Gilles Richard (professeur d’histoire contemporaine), il vient pourtant de renvoyer son ruban à Laurent Wauquiez, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. « Par solidarité avec nos collègues des écoles, collèges et lycées qui subissent de plein fouet la politique du non-remplacement d’un professeur sur deux partant en retraite. »
Puni d’avoir démocratisé
Ces trois professeurs constatent que, « depuis trois ans », quelque chose a changé au lycée. Exemples ? « Les élèves n’étudient plus la période du Front populaire, mais le souvenir du Front populaire », pointe Gilles Richard. « On étudie tous les conflits du XXe siècle en dix-sept heures de cours ! » Jacques Harel dresse le même constat : « En anglais, on voit les effets de la réduction des horaires. Les écarts sociaux se creusent entre les élèves qui ont la chance de pouvoir aller en Angleterre et les autres. Malgré leurs efforts ! »
« Nous avons des élèves motivés, intelligents », se félicite Gilles Richard. « Le niveau ne baisse pas mais il leur manque des acquis structurants, comme la maîtrise de l’écrit et de la pensée », poursuit Erik Neveu. En entrant à Sciences Po, ces étudiants doivent bûcher dur pour emmagasiner à marche forcée ce que le lycée ne leur a pas apporté.
Avec leurs médailles, les profs envoient également leurs doléances : « On accueille 1 100 élèves », détaille Erik Neveu. C’est 50 % de plus qu’il y a cinq ans. Mais on n’a pas eu un seul poste de prof ou d’agent administratif supplémentaire. Que ceux qu’on finance avec les deniers de l’école. » « On a besoin de postes pour ne pas décourager les gens et pour suivre nos élèves », renchérit Gilles Richard.
« Nous accueillons 52 % de boursiers en 1re année et 42 % pour l’ensemble des étudiants, poursuit-il. Ceux-ci ne paient quasiment pas de frais d’inscription. Nous avons compensé en augmentant les frais pour les autres. » Aujourd’hui, ils sont proportionnels aux revenus des familles : « Entre 300 € et 3 500 € par an. Le manque à gagner s’élève à 300 000 € », détaille Erik Neveu qui conclut : « On caracole en tête des écoles pour le nombre de boursiers, mais on est puni d’avoir démocratisé. »
À lire dans Ouest-France