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Lettre ouverte de l’APMESU (Association des professeurs de musique et musicologie de l’enseignement supérieur) au Premier Ministre - 11 mars 2013

mardi 12 mars 2013, par Mariannick

Lettre ouverte à Monsieur le Premier ministre

A l’heure où, en Suisse, la formation musicale des élèves entre dans la Constitution (votation du 23 septembre 2012), le projet de loi pour la refondation de l’École s’apprête à faire disparaître (art. 6 du Code de l’éducation) les termes garantissant aux élèves de la République française l’égalité d’accès aux enseignements artistiques.
En effet, un alinéa majeur est supprimé : « les enseignements artistiques font partie intégrante de la formation scolaire primaire et secondaire. Ils font également l’objet d’enseignements spécialisés et d’un enseignement supérieur ». Les termes d’« enseignements artistiques » sont systématiquement remplacés par ceux d’«  éducation artistique et culturelle  » en même temps qu’apparaît la notion de « parcours artistique et culturel » mis en œuvre « localement, notamment à travers les projets éducatifs territoriaux ». Ce parcours est «  assuré par des enseignants de l’éducation nationale » (sans précision quant à leur discipline) « auxquels peuvent être associés des acteurs du monde culturel et artistique et du monde associatif ».

Conjointement au projet de loi pour la refondation de l’École, le ministère de la culture et de la communication a organisé une Consultation sur l’Éducation artistique et culturelle (rapport de janvier 2013). Si les intentions affichées en sont évidemment louables, l’absence de tout représentant de l’Éducation nationale pour l’éducation musicale dans le cadre d’une telle consultation est fort choquante.
Le projet éducatif territorial (tributaire des finances des communes), semble être l’alpha et l’omega d’une éducation artistique et culturelle sans délimitation entre le scolaire et le péri-scolaire. Le principe de l’égalité d’accès de tous les élèves à un enseignement, jusqu’ici garanti par la loi, serait donc rompu.

Rencontrer des artistes, se rendre au concert ou au musée, découvrir des œuvres, permet une imprégnation artistique et culturelle, mais ne se transforme en éducation que par l’enseignement. Un enseignement obligatoire est délivré dans toutes les disciplines, il doit l’être également dans les disciplines artistiques. Au collège, ces spécialités sont garantes non seulement de la transmission d’une culture générale de la discipline artistique mais aussi d’une pratique hebdomadaire (vocale, plastique) qui en permet l’appropriation sur la durée ; quant à la polyvalence du professeur d’école, elle ne saurait exclure le domaine des arts. On ne peut réduire l’éducation artistique à des projets ponctuels, « ramassés » sur une courte durée, variant d’un endroit à l’autre du territoire. Les projets artistiques doivent s’articuler aux enseignements dans un souci de cohérence et de développement artistique des élèves sur le long terme. Ces enseignements artistiques participent de longue date et activement à la lutte contre l’échec scolaire. Le dialogue entre le ministère de la culture et les acteurs des enseignements artistiques de l’éducation nationale, dont ne témoigne pas la Consultation de janvier 2013, est donc important, tout autant qu’une vraie connaissance de ce qui est déjà fait par les acteurs de terrain.

Nous restons attentifs à l’évolution de ce projet de loi qui suscite de nombreuses inquiétudes, notamment au plan de la constitutionnalité. Quel paradoxe que de parler ici de refondation de l’École, si l’on en mine les fondations jusque dans la loi !

Espérant que vous serez sensible à nos inquiétudes, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de notre haute considération.

Le 11 mars 2013, Pour l’APMESU
(Association des professeurs de musique et musicologie de l’enseignement supérieur),
La présidente, Marie-Cécile Barras