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Communiqué sur la mise en œuvre du « suivi de carrière » - Qualité de la science française, 17 janvier 2017

mardi 17 janvier 2017, par Pr. Shadoko

Où en ces temps d’après galette des rois et de juste avant les sessions de qualification qui verront se réunir les sections du CNU, Pantagruel découvre que le cadavre de l’université bouge encore (et par -4°C ce n’est pas mal du tout...).

Acte 1 : QSF

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Le décret n° 2014-997 du 2 septembre 2014 sur les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs a remplacé leur évaluation quadriennale par le « suivi de carrière ». Le Bulletin officiel n° 20 du 14 mai 2015 définit ainsi le suivi de carrière : « [il] consiste en un examen individualisé et périodique de la situation professionnelle de l’enseignant-chercheur permettant son accompagnement durant l’ensemble de sa carrière par la formulation de recommandations. L’objectif sera de faciliter la réalisation des projets professionnels des enseignants-chercheurs dans le cadre des politiques de recherche et de formation mises en œuvre par les établissements d’enseignement supérieur ».

QSF a rappelé dans plusieurs communiqués et tribunes sa position sur l’évaluation, qui peut être résumée de la façon suivante : a) Le Conseil national des universités (CNU) doit réserver une évaluation approfondie aux enseignants-chercheurs qui souhaitent demander une promotion au grade supérieur, un congé sabbatique ou la prime d’encadrement doctoral et de recherche (PEDR) ; b) Les universitaires qui n’ont pas soumis leur dossier de carrière depuis cinq ans au CNU peuvent faire l’objet d’une évaluation de leurs recherches par la section compétente de ce Conseil, sous réserve qu’une telle évaluation ne débouche pas sur une modulation des services. L’évaluation de la didactique ne devrait pas rentrer selon QSF dans les compétences du CNU, car elle pose de problèmes méthodologiques et déontologiques qui ne semblent pas relever d’un contrôle collégial.

Or le décret du 2 septembre 2014, qui prévoit l’« examen individualisé et périodique de la situation de l’enseignant-chercheur », va bien au-delà de l’obligation de rédiger tous les cinq ans un rapport soumis à l’évaluation du CNU. Le texte précise en effet que « les recommandations de la section […] peuvent porter sur : – les évolutions professionnelles envisageables ou attendues ; – les stratégies pouvant ou devant être développées en matière de recherche ou de formation ; – l’amélioration de la qualité de la candidature de l’enseignant-chercheur à diverses promotions ». Le CNU est donc appelé non pas à une évaluation scientifique du dossier de l’enseignant-chercheur – ce qui serait conforme à sa mission – mais à réorienter le cas échéant la carrière du collègue suivi, en formulant des recommandations concernant aussi bien les objets de sa recherche que ses pratiques d’enseignement.

QSF ne peut accepter une telle conception du « suivi de carrière », qui comporte une atteinte grave aux libertés académiques d’enseignement et de recherche. Le « suivi de carrière » ainsi entendu et appliqué risque de se transformer en un contrôle des missions statutaires de l’enseignant-chercheur et est susceptible de réintroduire par le biais du CNU la modulation des services, dont rêvent un certain nombre de présidents d’université.

QSF rappelle que l’université n’est pas un lieu infantilisant et que les universitaires n’ont pas besoin de « tuteurs » pour les conseiller sur la « réalisation (de) leurs projets professionnels ». Les universitaires sont capables d’organiser eux-mêmes leurs missions. L’idéologie managériale qui sous-tend ce projet est profondément contraire à ce qui fait l’essence de l’université et traduit une dérive inquiétante.

QSF partage l’inquiétude dont fait part l’appel commun de la CGT FERC Sup, du SNESUP-FSU et de SUD ÉDUCATION contre la mise en œuvre dès le mois de mars prochain du « suivi de carrière ». Notre association rappelle que la menace est réelle puisque les procédures et le calendrier de la campagne 2017 (concernant selon la terminologie ministérielle les universités de la vague C) sont déjà publiés sur le site du MESR.

QSF s’associe à l’appel adressé des syndicats et demande au CNU de ne pas exercer une forme de contrôle bureaucratique sur les missions statutaires de l’enseignant-chercheur qui serait contraire à la liberté d’enseignement et de recherche. QSF invite les universitaires à être solidaires des sections du CNU qui ne mettraient pas en œuvre le « suivi de carrière » selon les modalités actuellement envisagées.