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Motion votée à l’unanimité des 24 DU de la Délégation Côte d’Azur du CNRS (20 février 2009)

samedi 21 février 2009, par Laurence

Nous, directeurs d’unités de recherche associés
au CNRS de la Délégation Régionale Côte d’Azur
(DR 20), contestons avec force le procès à charge
de la recherche française que le Président de la
République Nicolas Sarkozy a instruit dans son
discours du 22 janvier 2009. Nous nous inquiétons
de l’impact négatif de ce discours sur l’activité
et la motivation des chercheurs,
enseignants-chercheurs, ingénieurs, techniciens
et administratifs, post-doctorants et doctorants
dont le travail quotidien est indispensable pour
la réalisation des projets scientifiques les plus ambitieux.

La présentation que le Président de la République
a faite de « l’autoévaluation » des organismes de
recherche, ne correspond pas à la réalité. Une
forte proportion des membres du Comité national,
qui évalue les chercheurs du CNRS, sont
extérieurs à l’organisme. Depuis deux ans, toutes
les unités de recherche, ainsi que les organismes
et les Universités eux-mêmes, sont évalués par
l’AERES, agence en principe indépendante selon la
loi d’orientation et de programmation pour la
recherche votée en 2006. Nous rappelons par
ailleurs que l’évaluation des acteurs de la
recherche est permanente : évaluation des projets
scientifiques, évaluation des articles soumis à
des comités de lecture, rapports quadriennaux.
Dans ce contexte, nous affirmons aussi qu’il
n’existe pas d’alternative sérieuse à
l’évaluation par des pairs, règle reconnue
partout dans le monde : l’évaluation ne peut être
faite que par des personnes compétentes.
Nous mettons en garde, enfin, contre la tentation
technocratique et dangereuse de réduire
l’évaluation des performances des individus et
des laboratoires à quelques indicateurs qui
dispenseraient d’une analyse rigoureuse de la situation et de ses causes.
La recherche aujourd’hui requiert une continuité
des efforts et une coordination au niveau
national ; elle doit par ailleurs s’inscrire dans
le contexte européen et mondial. Dans cet
environnement, la pluridisciplinarité du CNRS est
un atout précieux qui doit être préservé : la
continuité thématique de l’organisme dans le sens
du positionnement du C3N est indispensable à
l’exercice de ses activités, et le démantèlement
et/ou dénoyautage dont le CNRS est menacé conduit
à sa perte et à l’affaiblissement du potentiel de recherche de la Nation.

Nul ne conteste l’importance d’un renforcement du
rôle des universités en matière de recherche.
Cependant, si les avis divergent sur l’équilibre
à définir sur le long terme, tous les
intervenants dans le débat soulignent qu’à court
et moyen terme seuls les organismes de recherche,
et en particulier le CNRS, peuvent assurer la
structuration de l’effort de recherche au niveau
national. Ce constat a été souligné par le
rapport d’Aubert au printemps 2008, qui
recommande de maintenir les Unités Mixtes de
Recherche au centre du dispositif en en
simplifiant la gestion, puis inscrit dans le plan
stratégique du CNRS le 2 juillet 2008, avec
l’accord du représentant de l’Etat au Conseil
d’administration de cet organisme. Pour assurer
cette fonction de coordination nationale, les
organismes doivent demeurer des opérateurs de recherche.
Enfin, nous rappelons que s’il est évidemment
légitime que la puissance publique dégage des
grands thèmes de recherche utiles à la Nation, la
définition de priorités par les scientifiques
eux-mêmes est une condition indispensable à
l’activité scientifique, tout comme l’est
l’existence d’une recherche dite fondamentale
digne de ce nom qui n’est pas soumise à des
impératifs d’utilité immédiate. Ce principe
d’indépendance académique est reconnu dans toutes
les grandes nations scientifiques, en particulier
au Royaume Uni et aux USA, souvent cités en modèle.

En conclusion, nous souhaitons que la conduite de
la réforme de la recherche se fasse en
concertation avec ses principaux acteurs. Nous
nous inquiétons des effets dévastateurs de
mesures et d’annonces précipitées sur des projets
qui mobilisent des moyens humains et budgétaires
importants pour de nombreuses années. Nous
considérons donc que le plan stratégique du CNRS,
défini il y a quelques mois en interaction
constante avec le ministère en charge de la
recherche, doit rester la référence définissant
l’avenir à moyen terme de l’organisme, ce qui
n’est pas compatible avec l’annonce faite dans le
discours du Président Sarkozy d’un passage à un
statut d’agence de moyens avant la fin 2009.