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Enseignement supérieur et recherche : il est grand temps d’arrêter les conneries !!! - Blog d’H. Audier, Educpros,

lundi 3 juin 2013, par Mariannick

2- Les bras d’honneur de Louis Gallois aux scientifiques, aux parlementaires et au MESR.

Pour apprécier les bras d’honneur que Louis Gallois, Commissaire général à l’investissement (Grand emprunt), fait à tout le monde, nous nous baserons sur ses propos à l’AEF [1] et à La Tribune [2].À lire ici.

Gallois justifie le Grand emprunt de Sarkozy sans la moindre nuance

Soyons clairs, nous n’avons pas trié les citations de Gallois en éliminant celles qui seraient critiques sur tel ou tel aspect du Grand emprunt : il n’y en a aucune. Il justifie le Grand emprunt de Sarkozy sans la moindre nuance (2). « Nous nous sommes inscrits dans un continuum, de l’amont vers l’aval pour aller de la recherche fondamentale à l’industrie avec nos différentes actions ayant pour fil directeur l’innovation : IDEX, LABEX, EQUIPEX, IHU, IRT, fonds d’amorçage et de capital risque. Dans l’enseignement supérieur et la recherche, les IDEX, ou initiatives d’excellence, ont favorisé un mouvement de regroupement d’universités et de grandes écoles sur un même site. Les projets ont été choisis par un jury international (…). Cela a été un travail très sélectif et même ceux qui pensaient parfois avec un peu d’arrogance y avoir droit d’office ont dû se plier à cette procédure ».

Il revendique sans complexe une continuité totale avec la droite

Ce qui est frappant, c’est que Gallois s’exprime en permanence comme s’il n’y avait pas eu de changement politique, comme s’il était encore tributaire des décisions de Sarkozy. Il utilise fréquemment le « nous » quand il parle du Commissariat à l’investissement, que cela soit avant ou après 2012 : « Je pense notamment au plateau de Saclay qui a dû s’y reprendre à deux fois parce que NOS exigences en matière de gouvernance n’avaient pas reçu la réponse adéquate. Cela a d’ailleurs contribué à NOTRE crédibilité ».

En fait, il accentue fortement un utilitarisme moins marqué initialement

En son temps, l’auteur avait analysé le Grand emprunt dans l’article : « Grand emprunt : sous couvert d’excellence, une catastrophe imminente ». Nous montrions que c’était avant tout un outil pour obliger les scientifique à s’insérer dans la politique gouvernementale, notamment en matière de structures et de modes de gouvernance (et ça continue, cf.« nos exigences en matière de gouvernance » sur Saclay), sans que nous ayons eu à insister sur l’aspect « utilitariste ».

Quand Gallois affirme « Nous nous sommes inscrits dans un continuum, de l’amont vers l’aval pour aller de la recherche fondamentale à l’industrie avec nos différentes actions ayant pour fil directeur l’innovation » il invente : les IDEX, Labex et autres EX ont d’abord été créés pour parachever la destruction des organismes et dépasser la LRU. Dans l’un de ses entretiens (1), il le reconnaît : « Aujourd’hui, le programme d’investissements d’avenir est passé à un cran de plus vers l’aval. Après avoir consacré des moyens conséquents à la recherche amont, il est temps maintenant d’assurer une fluidité dans le processus vers l’industrialisation. »

Bras d’honneur pour tout le monde

Alors pourquoi Gallois change-t-il les paroles de la chanson. Simplement parce qu’en assimilant totalement le Grand emprunt à l’innovation, il récupére non seulement les 13 milliards du Grand emprunt devant aller à l’industrie, mais aussi les 22 milliards de l’ES-R. Le MESR peut aller se faire voir, c’est Gallois, et lui seul, qui a de l’argent et qui impose ce qu’il veut.

Et c’est très concret. A la question de l’AEF de savoir s’il entend répondre à la demande du rapport Le Déaut d’utiliser 1 milliard (sur les 2,2 non encore affectés du Grand emprunt) pour « un rééquilibrage territorial », la réponse de Gallois est : « Ce ne sera pas immédiatement le cas » (1). Et pour bien se faire comprendre, il ajoute (2), avec une élégance que chacun appréciera : « Les ministères sont tentés d’avoir recours à l’argent du grand emprunt. Mais, avec l’appui du Premier ministre, nous nous sommes attachés à défendre l’abreuvoir face aux caravanes de chameaux… ». Mais le plus beau bras d’honneur est pour les scientifiques et pour les organisateurs des Assises.

Le mépris pour les scientifiques

Toutes les organisations ou instances représentatives des scientifiques avaient demandé, pour le moins « une remise à plat du Grand emprunt. Quels que furent les problèmes des Assises, il reste que le rapport final reprend cette idée en demandant que les Idex, Labex et autres Ex n’aient plus de « personnalité morale » et s’intègrent au structures normales. En réponse, Gallois reprend mot pour mot ce qu’aurait pu dire Pécresse (2) : « Les 8 IDEX retenues à ce jour, y compris deux projets encore en cours de création (…) , bénéficient d’une dotation en capital dont ils pourront consommer les intérêts. Si au bout de quatre années probatoires, ils sont restés fidèles au projet, cette dotation leur sera acquise. Quant aux LABEX et aux EQUIPEX, les laboratoires d’excellence et les équipements d’excellence, ils ont permis de mettre en place un financement de long terme pour des projets de recherche de niveau mondial ou pour des équipements de pointe qui peinaient à trouver des financements ». Pas un mot de changé ! A l’évidence, au lieu de simplifier le système d’ES-R, Gallois a décidé qu’on gardait toutes les scories du sarkozisme. Et au-delà de l’ES-R, il reprend l’idée de la TVA sociale pour financer les 20 milliards du Crédit d’impôt pour la compétitivité.

Ce n’est pas en repiquant toutes les recettes de la droite qu’on remontera la pente. Il faut que le MESR récupère les 22 milliards destinés à l’ES-R dans le Grand emprunt, ne serait-ce que parce que cet argent lui appartient : comme l’a dit Sarkozy en lançant l’emprunt [3], il a été compensé par la baisse des crédits du ministère depuis 2010, et même au-delà.

Lire aussi dans les blogs d’Educpros


Enseignement supérieur et recherche : il est grand temps d’arrêter les conneries !!! 1- Nous ne voulons qu’un seul ministre de l’ES-R. Récupérer nos 22 milliards du Grand emprunt est LA priorité.

et Enseignement supérieur et recherche : il est grand temps d’arrêter les conneries !!! 3- « Quand on est au fond d’un trou, il faut arrêter de creuser »


[1AEF, dépêche n°177848 du 25 janvier 2013

[2La Tribune du 19 avril 2013.

[3« L’emprunt s’articule pleinement avec notre stratégie de réduire le déficit structurel dès que la croissance le permettra. Les intérêts de l’emprunt seront compensés par une réduction des dépenses courantes dès 2010 et une politique de réduction des dépenses courantes de l’Etat sera immédiatement engagée ». Promesse qui a été tenue !!!