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Agrégation ? Dossier sur une non-réforme en cours… Novembre 2013

samedi 23 novembre 2013, par Mademoiselle de Scudéry

Une dépêche AEF, un "pauvre-point" échappé du ministère que personne n’a vus à SLU. Il n’empêche…
Le Monde,
La Société des agrégés,
Le Snalc en bruissent.


Réforme de l’agrégation : le brouillon qui fait peur

Aurélie Colas, Le Monde, 22 novembre 2013

Il suffit parfois de peu de choses pour déclencher une vive polémique. Une feuille, quelques mots… pas plus. Depuis quelques jours circule dans le petit monde de l’éducation une sorte de présentation « powerpoint » de ce qui pourrait être une réforme des missions des professeurs agrégés et du concours de l’agrégation.

Sans savoir quel était précisément le statut de ce document, qui en était l’auteur - parfois sans même l’avoir eu entre leurs mains ! -, des organisations d’agrégés se sont insurgées contre la « casse » de l’agrégation. C’est dire si le sujet est explosif…La feuille en question – que Le Monde s’est procuré et que le ministère de l’éducation nationale assure être un « document interne » issu de ses « services », pas du cabinet de Vincent Peillon -, donne des pistes d’évolution. Non pas des propositions concrètes, mais de simples interrogations.

S’agissant de la formation des agrégés, elle propose de développer un « volet professionnel », avec des « périodes de stages en établissement scolaire : quatre semaines au cours du master ». Si le ministère a réformé, l’an dernier, le capes – justement pour introduire une plus forte dose de pratiques professionnelles dans la formation des professeurs certifiés -, il n’a pas encore touché à ce monument historique qu’est le concours de l’agrégation.

"Débuts de carrière" au collège

Sur le concours justement, les auteurs proposent de substituer à l’épreuve « Agir en fonctionnaire de l’Etat [1] » une « autre épreuve », et d’introduire « un entretien fondé sur un dossier construit par le candidat » durant son master. Enfin, ils envisagent des « débuts de carrière » au collège – alors que les agrégés enseignent pour la plupart au lycée ou à l’université -, ou encore de leur attribuer « un rôle particulier dans l’animation pédagogique » d’un établissement scolaire.

Il n’en fallait pas plus pour réveiller les soupçons d’une « dévaluation » de l’agrégation ; pour faire resurgir les craintes de voir l’agrégation se transformer en « capes bis ». De fait, augmenter la part de formation professionnelle et de stages dans la préparation du concours revient, pour certains, à restreindre la part de connaissances théoriques. Or, c’est précisément sur le haut niveau de savoirs disciplinaires que repose la spécificité de l’agrégation.

Renommée mondiale

« Réduire la part de la formation disciplinaire dans la préparation des concours est une erreur et porte atteinte au niveau d’exigence qui fait de l’agrégation un concours de qualité », prévient le syndicat Snalc. « La spécificité de l’agrégation repose sur son haut niveau de connaissances requis ; c’est le seul critère valable, fiable et reconnu qui doit intervenir lors de la sélection », renchérit Blanche Lochmann. La présidente de la Société des agrégés craint une perte de la renommée mondiale de l’agrégation : « J’ai des adhérents recrutés partout dans le monde. L’agrégation est considérée comme un concours de l’enseignement supérieur qui donne des garanties de bonne maîtrise des connaissances. »

Le ministère assure que « la réforme de l’agrégation n’est pas d’actualité ». Mais l’on soutient, parmi les agrégés, que des idées de réforme commenceraient à circuler entre les jurys d’agrégation, les services de l’éducation nationale, ceux de l’enseignement supérieur et les inspections générales. Les organisations d’agrégés s’inquiètent d’une réforme élaborée en catimini. « L’an dernier, personne n’a vu venir la réforme du capes. On est passé directement de pistes de réflexion à des textes précis ! », rappelle Mme Lochmann. Pas question, pour elle, de se laisser surprendre.


Un mauvais « bouillon de onze heures » pour l’agrégation

Blog de la Société des Agrégés, Blanche Lochmann, 13 novembre 2013.

L’idée a fait son chemin depuis plusieurs mois dans quelques cerveaux embrumés : et si on réformait l’agrégation ? Les rumeurs ont passé, désormais les documents circulent. Les commis ont revêtu leurs tabliers et l’agitation croît en cuisine.

Sur le papier, la recette d’un potage allégé et recuit : ajouter une pointe de stage, trois grains de professionnalisation, verser une cuillerée d’entretien sur dossier, faites réduire à une ou deux épreuves...

Croit-on vraiment pouvoir nous faire avaler cette soupe ? Faire passer trois idées, toujours les mêmes, congelées depuis plus de vingt ans, pour de l’innovation fraîche ?

Faut-il le rappeler ? L’épreuve « Agir en fonctionnaire de l’État » n’a pas démontré son utilité, les épreuves sur dossier sont, de l’avis des examinateurs, les plus propices à la fraude et personne n’a jamais prouvé qu’une réflexion hors-sol à partir d’un cours qui n’a jamais eu et n’aura jamais lieu est un instrument de sélection fiable.
Pour une agrégation à la hauteur des enjeux d’enseignement mondiaux

Le manque d’imagination le dispute au manque d’ambition : rien sur la place qui revient à l’agrégation dans un système mondial, alors que le développement des MOOC consacre le retour à un enseignement de contenus, alors que l’université française introduit des cursus entiers en langues étrangères et que ses étudiants sont confrontés à la concurrence de diplômés issus de processus extrêmement sélectifs.

L’agrégation continue à attirer des étudiants en dépit de la complexification des démarches et des parcours, elle garantit les connaissances disciplinaires générales nécessaires à la poursuite d’une recherche de haut niveau, elle est surtout une certification nationale reconnue là où nos universités peinent à exister individuellement à l’échelle mondiale.

La Société des agrégés s’élèvera avec vigueur contre toute réforme visant à réduire la part disciplinaire dans le concours de l’agrégation et à calquer les épreuves sur un nouveau Capes vidé de sa substance.

L’agrégation mérite mieux qu’un bouillon de onze heures préparé et servi en tapinois.


Ne cassons pas l’Agrégation !

Communiqué de presse du SNALC-FGAF du 19 novembre 2013.

Le SNALC-FGAF dénonce avec véhémence les propositions sur l’évolution et la place de l’agrégation contenues dans le document remis par le Ministère aux Inspecteurs Généraux et dont les grandes lignes ont été révélées par l’AEF vendredi 15 novembre.

Pour le SNALC-FGAF, la transmission des connaissances constitue l’élément fondamental de l’acte d’enseigner. Réduire la part de la formation disciplinaire dans la préparation des concours est une erreur et porte atteinte au niveau d’exigence qui fait de l’agrégation un concours de qualité, servant de vivier de recrutement à l’Enseignement supérieur.

Le SNALC-FGAF rappelle que les épreuves dites "professionnelles" n’ont jusqu’à présent pas fait preuve de leur pertinence, loin s’en faut, et que l’on y a constaté de nombreuses dérives idéologiques. C’est pourquoi nous nous opposons à l’édulcoration du contenu disciplinaire de l’agrégation, parce que nous sommes convaincus que ce sont des concours de recrutement de professeurs de haut niveau, dans les disciplines générales et technologiques du Secondaire et du Supérieur, qui assurent la place de la France dans le domaine de la formation et de la culture.


[1Dont le titre complet est Agir en fonctionnaire de l’Etat et de façon éthique et responsable