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"La démocratie à l’université : parlons-en !" - par les porte parole de SLU, L’Humanité dimanche, semaine du 12 au 18 février 2009
samedi 14 février 2009, par
La situation de l’université française est fondée sur trois principes essentiels et sur un non-dit.
Le non-dit est l’existence des grandes écoles. Un élève de classe préparatoire bénéficie d’un investissement double d’un étudiant à l’université. Toute réforme de l’enseignement supérieur et de la recherche qui refuse de prendre en compte cette inégalité de fait ne peut être que de mauvaise foi.
Les principes essentiels sont les suivants : 1. l’enseignement supérieur est fondé sur une articulation entre production et transmission des savoirs. 2. tous les étudiants doivent avoir un libre accès à toutes les filières. 3. l’université est administrée par ses personnels selon des principes de collégialité et de représentation, par l’élection, de toutes ses composantes.
Le premier point suppose l’indépendance présidant à la production des connaissances comme à leur transmission ; elle garantit l’esprit critique moteur de toute pratique démocratique. Le second et le troisième point requièrent une conception de l’autonomie aux antipodes de celle que promeut la loi LRU : l’autonomie, ce n’est ni « choisir ses étudiants » (N. Sarkozy, 5 février), ni la concentration du pouvoir entre les mains du président, ni l’attelage d’un désengagement budgétaire de l’État et de son contrôle accru. La question institutionnelle est donc une question intellectuelle et sociale, scientifique et éthique ; elle implique des choix quant aux formes d’investissement financier dans l’enseignement supérieur et la recherche.
C’est ce que manque tout empressement à appliquer à l’Université des méthodes de gestion managériales. Il faudrait acquérir la « culture du résultat », de la « performance », il faudrait entrer dans l’« économie de la connaissance ». Les universitaires ne sont donc pas soucieux de leurs enseignements, de leurs recherches ? ils ne sont jamais évalués tout au long de leur carrière ? une émulation n’existe pas entre les enseignants-chercheurs, entre les universités et entre les centres de recherche ? Que les apprentis réformateurs s’informent de ce que sont la recherche, l’évaluation, l’enseignement universitaire ! L’émulation n’est pas la compétition sauvage entre individus et entre institutions, la production de connaissances ne répond pas à un modèle économique, et nous ne sommes pas des employés de l’Université en quête de primes d’efficacité. La concentration excessive des pouvoirs au sein de chaque université risque de transformer l’exercice de la légitime autorité présidentielle en un agrégat de féodalités néfastes. Partout où cela est possible, il faut exiger que, dans toutes les instances, soit renforcé ou rétabli le principe de l’élection contre celui de la nomination ou de la seule cooptation.
La politique actuelle veut créer de l’irrémédiable. Si le gouvernement arrivait à ses fins, ce serait un bien commun fragile, un pan essentiel de notre société démocratique, imparfaite certes mais vivante, que l’on mettrait à bas.