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L’université Paris-Saclay en passe de voir le jour / Paris-Saclay manquera-t-elle de démocratie ? - Essonne Info, 24-25 juin 2014

dimanche 6 juillet 2014, par Elisabeth Báthory

L’université Paris-Saclay en passe de voir le jour

L’université Paris-Sud a approuvé ce lundi les statuts de la Communauté d’universités et établissements instituant la future université Paris-Saclay. Regroupant 13 établissements d’enseignement supérieur, un modèle d’université unique est en cours de naissance, avec un véritable chamboulement du système universitaire à la clé.

A lire sur le site Essonne Info.

Le vote ce lundi, par le Conseil d’administration de l’université Paris-Sud (ex Paris-11 Orsay), des statuts de la Communauté d’universités et établissements (Comue) marque un pas important dans la construction de la future université Paris-Saclay. Avec cette décision, la prestigieuse université de science rentre pleinement dans le processus d’intégration, comme au total treize établissements qui composeront la nouvelle université Paris-Saclay (université de Versailles-Saint-Quentin, ENS Cachan, Polytechnique, HEC, ENSTA ParisTech, Ecole Centrale…), ainsi que sept organismes de recherche (CEA, CNRS…).

L’ancienne fac d’Orsay est en effet l’un des piliers de Paris-Saclay, avec ses 27 000 étudiants et 2400 enseignants. « Paris-Sud pèse un poids très lourd dans l’ensemble » indique Colette Voisin, vice-présidente du Conseil des études et de la vie universitaire. Au total, l’université Paris-Saclay comptera 60 000 étudiants, pour environ 6500 enseignants-chercheurs. Le modèle sur lequel se constitue l’ensemble a cela de particulier qu’il n’existe pas à l’heure actuelle. Universités et grandes écoles regroupées au sein d’une même structure, Paris-Saclay porte l’objectif de faire travailler ensemble ces acteurs d’horizons différents.

Selon Elisabeth Dufour-Gergam, directrice de la formation de la Fondation de coopération scientifique (FCS), structure de base du campus Paris-Saclay, « on créé une université à part entière, un modèle qui n’existe pas ici, ni à l’étranger, où universités et écoles se rencontrent ». L’université Paris-Saclay devrait officiellement être créée à l’automne prochain, et les diplômes porteront sa mention à partir de l’année prochaine. Pour le moment, les établissements la composant doivent approuver les statuts de la Comue avant juillet, ce qui devrait permettre à la nouvelle entité de voir le jour dès septembre.

Une intégration par les diplômes

Se poursuivra alors le processus d’intégration des universités et écoles au sein de Paris-Saclay, initié par la recherche. « On est d’abord partis sur un travail entre les équipes de recherche, et un collège doctoral unique est créé au niveau de Paris-Saclay » explique Elisabeth Dufour-Gergam. Concernant les formations de Master (bac +5), les différentes équipes pédagogiques élaborent des partenariats entre elles pour « proposer des offres qui ne soient pas concurrentes » précise la directrice de la formation de la FCS. « L’idée est de tout remettre à plat et de monter des choses en commun, il y a une vraie valeur ajoutée à être à plusieurs » assure-t-elle.

C’est ainsi que les membres de Paris-Saclay vont peu à peu transférer tout ou partie de leur formation, pour des diplômes qui seront labelisés de la nouvelle entité. Pour l’actuelle université Paris-Sud, par exemple, seuls quatre Masters resteront en propre, sur une cinquantaine en tout. « 90% de nos Masters vont devenir des Master Paris-Saclay à la rentrée 2015″ indique Colette Voisin. Le pilotage sera assuré par la nouvelle entité même si Paris-Sud « continue à coordonner la construction de l’offre de formation » précise-t-elle. Du côté des écoles, celles-ci vont continuer à délivrer leurs diplômes d’ingénieur, qui seront labellisés « Saclay » le jour où tout sera intégré. Les étudiants pourront cependant poursuivre leur parcours dans des Masters ou doctorats (bac +8) communs entre les différentes composantes de Paris-Saclay.

La visibilité internationale recherchée

Avec la mise en place de l’université Paris-Saclay, les membres vont franchir un cap dans leur coopération au sein de ce campus qui ne cache pas ses ambitions mondiales. Première université française au sein du classement de Shanghaï (40ème mondiale), l’université Paris-Sud va petit à petit se fondre dans le nouvel ensemble. Tout en gardant leur identité, leur titre et leur concours respectif, les écoles comptent sur une reconnaissance internationale accrue avec ce véritable mastodonte.

La Communauté d’universités et établissements (Comue) disposera ainsi de moyens nouveaux, et l’université Paris-Saclay est déjà appelée à être la tête de proue de la recherche et de l’innovation en France, avec la présence sur le territoire du campus de nombreux centres de recherche, laboratoires et entreprises. « L’excellence sera visible à l’échelle internationale » souligne Elisabeth Dufour-Gergam. La période de transition qui s’ouvre soulève néanmoins un certain nombre de questions. La coordination de l’ensemble sera-t-elle suffisamment démocratique ? L’université d’Evry, associée au projet, intégrera-t-elle en tant que membre à part entière Paris-Saclay ?


Paris-Saclay manquera-t-elle de démocratie ?

Un nouveau modèle d’enseignement supérieur est en train de voir le jour avec la construction du campus Paris-Saclay. Mais son caractère hybride pose la question de la représentativité des différents acteurs dans ses instances, et plus largement, du modèle démocratique des universités.

A lire sur le site Essonne Info.

Avec la constitution de l’université Paris-Saclay, les cartes sont totalement rebattues au sein de l’enseignement supérieur. La Communauté d’universités et établissements (Comue) créée entre deux universités (Paris-Sud Orsay et Versailles-Saint-Quentin) et neuf grandes écoles chamboule totalement l’organisation du système universitaire tel qu’on le connaît.

Avec un calendrier qui s’accélère, puisque dès septembre prochain, l’université Paris-Saclay sera officiellement sur les rails, les établissements membres avaient à se prononcer sur les statuts de cette Comue. Ils ont par exemple été adoptés le 19 juin dernier par l’école Polytechnique, et ont été débattus puis votés ce lundi au Conseil d’administration de l’université Paris-Sud (ex Paris 11-Orsay).

Plusieurs représentants élus en ont profité pour soulever des interrogations quant au calendrier et l’organisation à venir de cet ensemble. Le 22 mai dernier, les organisations syndicales des différents établissements et organismes de recherche associés soulignaient dans un courrier à l’adresse du Premier ministre le manque de temps imparti pour la constitution de cette Comue. « Cela est incompatible avec un processus démocratique s’appuyant sur les acteurs concernés, que ce soit les personnels de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (académique ou non), les étudiants, les collectivités locales » écrivent les 15 organisations signataires.

Risque de « chèque en blanc »

Au sein du CA de l’université Paris-Sud, plusieurs voix se sont également faites entendre sur l’intégration de l’établissement au sein du campus Paris-Saclay. Sabine Nagel est maître de conférence en économie et élue au Conseil d’administration de l’établissement. Selon elle, « la politique de coopération de site est très pertinente, j’y suis favorable, mais les universités offrent tout, nos doctorats, nos masters, avec un vrai risque de chèque en blanc, car dans cette organisation, ce sont les écoles qui impriment leur marque » . Comme d’autres élus, elle s’est ainsi abstenue sur ces nouveaux statuts.

Le futur Conseil d’administration de l’université Paris-Saclay sera composé de six représentants des établissements, cinq enseignants chercheurs, trois personnels administratifs et deux étudiants. Un poids jugé « ridicule » par le président de l’Union nationale des étudiants de France (Unef) William Martinet. Présent fin mai à Evry pour une rencontre nationale des élus étudiants, ce dernier n’hésite pas à critiquer le modèle démocratique en préparation : « on ne peut pas accepter qu’il y ait le moindre lieu de pouvoir, une université ou un regroupement d’universités, où les étudiants ne peuvent pas défendre leurs conditions d’étude. Par exemple, la représentation étudiante à Paris-Saclay est détestable, on est à deux représentants étudiants dans le Conseil d’administration. Je pense qu’il y a une volonté d’écarter les étudiants des centres de décision » .

« Une université à part entière »

« C’est un énorme chamboulement » concède Elisabeth Dufour-Gergam, directrice de la formation de la Fondation de coopération scientifique (FCS), structure de base de l’université Paris-Saclay, mais assure-t-elle, « ce sera une université à part entière, avec un modèle qui n’existe pas, c’est une structure originale à monter, à faire fonctionner, et nous avons la volonté de ce que chacun y soit correctement représenté » .

Représentant du Snesup à l’université d’Evry, qui est appelée à rejoindre Paris-Saclay d’ici trois ans, Philippe Naszalyi est quant à lui méfiant sur le modèle universitaire proposé : « les universités sont démocratiques depuis le XIIIè siècle, le principe de la FCS, c’est un système privé, dans lequel les grandes écoles ont le plus grand poids, c’est pourquoi les statuts de la Comue ont été rejetés dans les Comités techniques des différents établissements » .

Avec un Conseil d’administration lié au comité Idex (qui bénéficie des financements liés aux initiatives d’excellence de l’Etat) et un Conseil académique consultatif (CAC) de 200 membres, difficile de s’y retrouver dans cette future organisation. « Il y a un comité de pilotage et des directions, avec un CAC indépendant, ce qui favorisera la visibilité de notre excellence » souligne pour sa part Elisabeth Dufour-Gergam. L’année 2014-2015 sera ainsi celle de la mise en application de ces dispositifs. Le temps de se rendre compte si la mécanique en oeuvre sera bien huilée.