Accueil > Pratiques du pouvoir > A l’heure de la mise en place de la sélection à l’université, la direction du (...)

A l’heure de la mise en place de la sélection à l’université, la direction du CNRS est en pleine crise de crédibilité !

lundi 22 janvier 2018, par Hélène

Le Figaro

Le président de l’Inria Antoine Petit est nommé président par intérim de l’organisme public en lieu et place de la biologiste Anne Peyroche, mystérieusement « empêchée » d’assurer ses fonctions.

C’est par un communiqué de presse lapidaire du ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation que l’on a appris la nouvelle. Anne Peyroche, présidente par intérim du CNRS depuis octobre dernier, « se trouve pour l’heure empêchée » d’assurer ses fonctions, est-il écrit sans plus de détails. C’est le président de l’Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique), Antoine Petit, qui assurera la fin de l’intérim. Sa nomination de plein droit à la tête du CNRS, pour succéder à Alain Fuchs parti à la tête de l’université Paris Sciences & Lettres le 24 octobre, était presque assurée, mais elle ne devrait être officialisée que la semaine prochaine, à l’issue du Conseil des Ministres du 24 janvier.

Ce qui ressemble donc fort à une passation de pouvoir précipitée a beaucoup surpris la communauté scientifique. Anne Peyroche a-t-elle été victime des accusations de fraude scientifique dont elle fait l’objet depuis sa prise de fonction ? Les soupçons ont émergé trois jours après sa nomination sur le sitePubPeer, une plate-forme sur laquelle les scientifiques peuvent pointer de façon anonyme les erreurs ou les trucages présumés de leurs confrères.

Cinq publications parues en 2001, 2003, 2007, 2009 et 2012 font l’objet de discussions sur le site. La biologiste est première auteure de la plus ancienne de ces études, et la dernière auteure des quatre autres (soit, par convention, la personne qui a encadré ces travaux). Les reproches portent systématiquement sur des images qui semblent avoir été retouchées.

Hospitalisation

Pour la dernière étude mise en cause, publiée dans les célèbres PNAS, la chercheuse a répondu à ces accusations sur le site en publiant les images originales et en détaillant les manipulations effectuées pour des questions de lisibilité. Ses explications semblent avoir convaincu ses confrères de sa bonne foi, même si ce type de retouche d’images contestable est désormais strictement interdit par les éditeurs de revues scientifiques. De nombreuses études, notamment françaises, font encore l’objet de ce type d’accusation. Les chercheurs se défendent en pointant le manque de moyens, et des matériels de scan vétustes qui les obligeraient à « retravailler » leurs images.

D’après nos informations, Anne Peyroche n’a pas été désavouée par le ministère ni par le CNRS. Son remplacement aurait été précipité pour des raisons de santé. Ce qui nécessitait d’organiser « la continuité de la gouvernance » de l’établissement public, assure le ministère. Ses problèmes de santé seraient néanmoins la conséquence de procédures engagées à son encontre par le CEA, son organisme de tutelle, pour ses publications contestées. L’ancienne présidente par intérim aurait été extrêmement affectée par cette procédure, au point d’être hospitalisée. Le CEA n’a pas souhaité commenter pour le moment. Anne Peyroche ne serait quant à elle pas en mesure de repondre à nos questions, indique-t-on à la direction du CNRS.

Le Monde

Enquête sur l’ex-présidente du CNRS Anne Peyroche

Des soupçons pèsent sur l’intégrité scientifique des travaux de la biologiste, qui fait l’objet d’une enquête interne. L’informaticien Antoine Petit a été désigné en urgence pour la remplacer.

Deux des plus importants organismes de recherche français, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), font face à des soupçons d’inconduite scientifique touchant une figure majeure de ces institutions. La biologiste Anne Peyroche, présidente par intérim du CNRS et employée du CEA, a été convoquée en début de semaine par sa hiérarchie pour un entretien destiné à l’éclairer sur des anomalies constatées dans certains de ses articles. Dans l’urgence, l’informaticien Antoine Petit a été désigné, jeudi 18 janvier au Journal officiel, président par intérim de l’organisme, alors même qu’il était prévu qu’il soit nommé lors du prochain conseil des ministres, le 24 janvier, après avoir été auditionné cette semaine par deux commissions parlementaires.

Cette précipitation dans un passage de relais qui aurait dû être parfaitement orchestré a pour origine le signalement, en novembre 2017, sur le site Internet PubPeer, qui permet de mettre en cause de façon anonyme le contenu des publications scientifiques, de cinq articles scientifiques cosignés par Anne Peyroche. Ces mises en cause, dont certaines ont été nourries par le bloggeur scientifique allemand Leonid Schneider, sont intervenues peu après la nomination de la biologiste à la présidence par intérim du premier organisme de recherche français, en remplacement d’Alain Fuchs, élu à la tête de l’entité Paris Sciences & Lettres. En l’occurrence, certaines figures présentées dans les articles étaient suspectées d’avoir fait l’objet de manipulations.

Plusieurs anomalies inexpliquées

Anne Peyroche et l’une de ses coauteures ont produit sur PubPeer les documents originaux pour éclaircir la situation concernant deux de ces articles. Anne Peyroche y convenait que certaines modifications d’images auraient dû être mentionnées dans le manuscrit. Elle soulignait également la qualité du matériel d’imagerie pour expliquer...

C’est sur PubPeer que les travaux du biologiste végétal Olivier Voinnet ont été mis en cause, conduisant en 2015 à des sanctions de la part du CNRS et de l’ETH de Zurich, ses organismes de tutelle.

C’est aussi sur PubPeer que Catherine Jessus, responsable de la recherche en biologie au CNRS a été incriminée – elle n’a pas jugé opportun de répondre sur le site.