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Parcoursup : des « passerelles » de secours - Marie Piquemal, Libération, 4 septembre 2018

mercredi 5 septembre 2018, par Mademoiselle de Scudéry

« Ce dispositif est lié à l’échec de Parcoursup. Ils ont lancé ça quand ils ont compris que les bacs pro allaient être refusés des BTS et de la fac. »

La phase principale de la procédure d’affectation post-bac prend fin ce mercredi, sans que l’on sache ce que vont devenir ceux qui n’ont toujours pas de place, souvent issus des filières pro.
À lire ici dans Libé.

Tic tac, tic tac. Le temps est compté pour la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, si elle veut atteindre son objectif, promis à longueur d’interviews et notamment dans Libé : qu’à la rentrée, aucun candidat ne se retrouve sur le carreau, sans aucune place dans l’enseignement supérieur. Le ministère a beau jouer sur la présentation des chiffres pour les rendre les plus positifs possibles, il reste tout de même une catégorie d’élèves qui montrent des signes de vie sur la plateforme (« les actifs ») et restent toujours sans aucune proposition. Ils étaient 8 900 au dernier décompte, mardi soir, sur les quelque 800 000 élèves inscrits au démarrage sur Parcoursup. Dans le lot, la moitié sont des étudiants en réorientation, les 4 421 autres viennent d’avoir leur bac. « Un bac professionnel ou technologique pour l’essentiel », précise le ministère de l’Education. La situation était sensiblement la même du temps d’APB : les élèves restant sur le carreau venaient pour la plupart de la filière professionnelle. « Un public particulier, pour lequel il faut un travail d’accompagnement. C’est pour eux qu’on crée les "classes passerelles" à cette rentrée. » Ce nouveau dispositif se met en place au pas de charge dans plusieurs lycées pour les recalés de Parcoursup.

Une bonne idée ?

Cyril Le Normand, proviseur du lycée Saint-Exupéry à Marseille et syndiqué au SNPDEN, est emballé par ce dispositif. « On accompagnait déjà les bacheliers pro en BTS avec des heures de cours en plus pour les aider sur les matières générales. Là, on monte d’un cran, pour ceux qui sont encore plus en difficulté. C’est pour moi l’une des missions de l’école. » L’idée, sur le papier du moins, séduit aussi Judith Rosenfeld, prof et coauteure du Lycée professionnel : relégué et avant-gardiste ? « Sur le principe, laisser du temps est une mesure intelligente. » Surtout que, rappelle-t-elle, le bac pro a été, il y a quelques années, ramené de quatre à trois ans pour officiellement se calquer sur les autres bacs.

Comment vont fonctionner ces classes ?

Rien n’est bien clair. « L’idée est bonne, mais il y a une impréparation, le dispositif a été mis en place à la va-vite pendant l’été », regrette Philippe Vincent, du syndicat des chefs d’établissement (SNPDEN). La grande majorité des enseignants ont découvert la nouvelle vendredi dernier, lors de leur prérentrée : les recteurs ont ouvert les classes pendant l’été, en fonction des estimations d’élèves dans la mouise. Au total, 2 000 places devraient être ouvertes, dans les lycées professionnels essentiellement. « Le texte n’a été publié au Bulletin officiel qu’en plein été, le 19 juillet », râle Sigrid Gérardin, du Snuep-FSU, troisième syndicat représentatif des enseignants de lycée pro. Pour elle, pas l’ombre d’un doute : Sa démonstration tient en trois points. « Aucun financement pérenne, les classes vont tourner avec des heures sup » - donc dépendant de la bonne volonté du corps enseignant. La preuve, selon elle, que « le gouvernement n’a aucune ambition réelle pour les bacheliers professionnels ».Deuxième hic : il n’y a aucun cadrage national sur le contenu pédagogique, le texte esquissant juste : « L’organisation pédagogique et les contenus de formation doivent être adaptés aux besoins des élèves au regard des spécialités de BTS visées. »

Des salles d’attente ?

Ces classes passerelles ne seraient finalement que « des salles d’attente dans lesquelles on range les jeunes », conclut Sigrid Gérardin. Que deviendront-ils l’an prochain ? Devront-ils se réinscrire sur Parcoursup en versant leur dossier de terminale, celui-là même avec lequel ils ont été recalés ? Ou auront-ils, de droit, une place réservée en BTS, avec le risque que cette année de remise à niveau soit insuffisante ? Rien n’a encore été arrêté, le texte renvoyant à une décision ultérieure. La question irrite Pascal Vivier, du Snetaa FO (majoritaire en lycée pro) : « Il faut leur dire. Ces jeunes veulent poursuivre leurs études, qu’on le veuille ou non. Si on ne veut pas qu’ils aillent à l’université, alors il faut ouvrir des places de BTS. »